La peur brouille les limites, elle confond danger interne et menace du monde. L’inconnu est des deux côtés, la peur est en lisière, imposant son attraction.
La nuit et l’étranger qui l’habite : la peur n’est-elle que du domaine de l’enfance, où elle sollicite, comme l’amour, le récit et l’excès des mots ? Dans l’Iliade, les dieux provoquent l’épouvante qui s’empare des hommes et transmet l’ancestral. De l’ancestral à l’enfance et à l’animal, l’écart est-il si grand, quand le corps n’est plus que tremblement de la surface et prise liquéfiante de la profondeur ? La peur semble le vestige nécessaire d’une très ancienne vigilance : au coeur même de notre peur, la vie qui tremble, menacée. Menace de mort ? Menace de vie.
» La vie est effrayante « , disait Cézanne.