Cân-Liêm LUONG : « Essai de psychologie comparée : La question de la responsabilité et de la culpabilité dans la psychologie bouddhique »

Cân-Liêm LUONG est psychiatre, docteur en Psychologie, chargé de cours à Paris XIII. Il exerce aussi à la Croix-Rouge Française et au Centre F. Minkowska, Paris.

De la place de la psychologie dans la culture.

Il y aurait un lieu commun de questionner la fonction de la loi interne et externe. On étudie alors ce qui gouverne la part de responsabilité et de culpabilité en toute chose entreprise depuis le ressenti et la définition de ce que sont des normes de vérité et de réalité. La phénoménologie de la perception et du jugement d’effet apportera une appréciation de ce qu’est le comportement normal. Le fait de parler pour un homme, engage t il sa seule responsabilité et toutes les conséquences de ses paroles ? La psychologie de l’adaptation du sujet discute avec son efficacité.

Un deuxième lieu commun serait de considérer ensuite cette question de la responsabilité et de la culpabilité, en termes juridiques du condamnable et du punissable par rapport à quelque chose devant aller de soi. L’énoncé d’un postulat de la loi naturelle envisage la possibilité d’une vraie responsabilité mise en acte qui ne créerait aucune culpabilité. Au nom de qui agit on, et de quoi se déclare t on le principe éthique universel : tu ne tueras point ? Il y aurait donc un référentiel absolu de la société parfaite qui saisit la situation légitime introjetée : la satisfaction serait la valeur ajoutée quand aucune culpabilité, ni honte ne s’en dégage. On discute ainsi de la performance politique d’une psychologie de l’adaptation dans une société d’entreprise.

Le pré requis culturel qui fixe le cadre est là, discuté et discutable.

Pour situer la problématique existentielle des deux notions de responsabilité et culpabilité, je vais nommer ce qui peut distinguer, de mon modeste point de vue de la culture, le sentiment et le sens qui les recouvrent.

En premier lieu, disons le couple du sentiment de culpabilité, et du sens de responsabilité. Il situe le lien qui relie un dedans et un dehors. Le sentiment de culpabilité énonce un ressenti interne qui conduit à une réaction d’arrêt plutôt sensitive, immédiate. Il contient le sujet. Le sens de responsabilité qualifie un jugement de soi par rapport à un système de nonnes intérieures et extérieures qui reviennent à la réflexion personnelle. Il aboutit à une prise de position que le sujet juge comme suffisamment forte pour la défendre (il se défend et se renforce). En conséquence de quoi, la personne peut juger par elle même d’être responsable mais de ne pas se sentir coupable. Il y a comme deux filtres. Cette orientation est admissible par rapport à la position dévolue à l’Ego comme le lieu central de l’opinion. Nous sommes dans le registre de la conscience interne du sujet qui pense et qui parle. Son jugement personnel prime sur le jugement externe. Le comportement qui en découle, fait date. Il exprime l’identité narcissique à travers des attributs comme la fierté, la motivation, l’ambition, voire la vantardise. C’est aussi de l’amour propre. De façon décalée, le juridique nomme la culpabilité en qualifiant la responsabilité selon ses codes. Il sera alors question aussi d’intentionnalité et de preuves, ou de démonstration de preuves exprimant une causalité. Un responsable est jugé « coupable » de l’évènement qui l’engage. L’absence de preuve démontre le contraire de la culpabilité responsabilité, c’est l’innocence. Par contre, en psychologie, le sentiment de non culpabilité ne signifie pas la même chose que le non sentiment de culpabilité comme quand l’on dit : je ne me sens pas coupable, ou bien je me sens non coupable.

Ensuite, nommons l’autre couple en miroir du sens de la culpabilité, et du sentiment de responsabilité. Le même lien qui les relie entre un dedans et un dehors, n’est plus de la même nature. Le sentiment de responsabilité est issu d’un jugement interne qui a accompli le passage stable de ce qu’est la réponse sans équivoque à la culpabilité. Le sens de la culpabilité certifie l’identité du sujet mature entre son état intérieur et l’appréciation globale de ce qui nommerait sa culpabilité, c’est à dire qu’entre le fait d’avoir ou de ne pas avoir provoqué la chose condamnable, il y a le contexte dans lequel cette chose ainsi énoncée, fait l’événement auquel se pose aussi la question d’une participation. On peut même se sentir responsable de sa propre culpabilité. Cette situation tendue pourrait mener à une auto dénonciation dans certaines circonstances particulières de changement d’interprétation. Qu’en est il de l’autoaccusation ? Comme une réminiscence de l’infantile, la personne avouera ce qu’elle imagine de ce que les autres souhaiteraient entendre. Cette personne n’a plus à faire avec la chose, mais affaire aux personnes pour être évènement, L’on peut se sentir coupable de tellement déplaire à l’autre que l’on accepte tout ce que l’autre vous montre ou suggère, comme une mauvaise bouillie que l’enfant devait avaler quand même. C’est pourquoi l’aveu ne vaut pas toujours comme preuve. Le mécanisme de l’autoaccusation pour ne pas déplaire, peut se déplacer, en plus atténué, dans des impressions sensations que « cela se voit », que « j’ai peut être fait quelque chose que je ne sais pas ». On se dit même qu’il n’y a pas de fumée sans feu, comme une autopunition d’être seulement présent, vivant, là où il y a le feu de l’évènement Ou bien, on pose la question phobique à soi et à l’autre : ai je une tête à faire cela ? Psychologiquement, l’on se donne une responsabilité des projections et des inductions par les effets que cela provoque chez les autres, comme une culpabilité inconsciente d’être là où l’on n’a pas (le droit) à y être. C’est à dire interdit de vivre.

Avec la question de la culpabilité et de la responsabilité, on entre dans le registre tierce de l’éthique par rapport à une référence au Bien et au Bon qui s’en dégagent. L’identité du sujet accédant à l’éthique, construit ses références de dignité, du respect et de la honte. La question de l’altérité revient ainsi au grand jour. L’Ego et l’Alter ego ne se posent plus dans une rivalité d’intérêt, ni dans une opposition comme leur condition d’existence réciproque. Réinvestis dans un cadre social, il sera question pour l’Ego et l’Alter ego de ce qu’est la réalisation du sens donné au Juste, en décalage de ce qu’est l’idée de la justice.

Notre réflexion sur le ressenti du sentiment et du sens, avait placé dans le même miroir, les deux notions de la culpabilité et la responsabilité. Le présupposé culturel joue souterrainement mais intensément comme le cadre necessaffe à la inise en place des problématiques de l’Ego et l’Alter ego.

À propos de la tradition hellénique et judéo chrétienne.

La culpabilité y traite de deux états : l’erreur et la faute, dans un rapport au parfait, voire à l’idéal.

La responsabilité sert à exprimer la reconnaissance d’un état : on peut être responsable d’une erreur, d’une faute et aussi d’une erreur coupable (=la faute). Il s’y déploie une procédure d’identification qui relève d’une psychologie du Moi de s’évaluer par lui même, par rapport à des références implicites et inconscientes. La culpabilité appelle au punissable, la responsabilité indique le perfectible.

L’arrière plan culturel est celui d’un modèle de l’irréprochable qui décline la question de la faute primordiale. Ces références implicites de la responsabilité et de la culpabilité sont portées culturellement par un mythe, celui de la responsabilité de Adam et Eve de vouloir accéder à la connaissance. On parle ainsi de cette responsabilité comme celle d’avoir commis la première faute originelle : responsabilité et culpabilité se rejoignent par un processus liant la connaissance. Du coup, la faute signifie la transgression des lois du mystère de la procréation, donc de la création du monde (actuellement, le sujet le plus porteur est le mystère de la biologie et ses corollaires : les modifications génétiques). Comme la curiosité est finalement un très puissant désir, la culpabilité et la responsabilité apparaissent d’une certaine façon comme des conséquences du désir, au même titre que le plaisir. En d’autres termes, la pulsion désirante au cours de ses mises en acte, produit du plaisir, de la frustration, de la culpabilité et de la responsabilité.

Par rapport à l’objet du désir, la raison du plaisir est donnée par la satisfaction de la chose réalisée ou découverte.

Se révèle par un détour, la question du plaisir positif du sujet de la responsabilité d’avoir agi. C’est le plaisir de faire, pour avoir fait, de celui qui assume entièrement, en son nota, le résultat de l’acte, quel que soit l’acte. B prend plaisir, il peut en être fier. Il aime être responsable, il aime en quelque sorte le pouvoir. Dans ces situations qui peuvent devenir pathologiques ou quasi pathologiques, c’est la question du « plaisir » de la culpabilité, c’est àdire un plaisir masochiste, pervers ou pervert donc finalement négatif comme un mode d’existence. À un moindre degré, possédant la puissance, est ce qu’on pousse toujours le bouchon jusquà la limite où la frustration viendra comme une butée d’arrêt ? Se reconnaît on alors dans notre masochisme ordinaire !

Je dirai donc que l’antithèse du désir n’est pas uniquement la frustration quand il faut composer avec les réalités internes et externes. Le terme tiers qui permet de tenir la situation, existe pour tenir le coup, si lon peut le dire. C’est un clair obscur, lintrication du sentiment et du sens, et de responsabilité et de culpabilité. On est dans un complexe qui mélange des proportions variables, changeantes, et de culpabilité et de responsabilité. Dit autrement, aucune personne n’est jamais complètement dépourvue d’un ressenti coupable sans se sentir responsable de quelque chose, ou bien se tenir pour responsable sans éprouver aucune culpabilité, même en éprouvant une satisfaction et du plaisir. Je dirai même que c’est par la culpabilité et la responsabilité que la conscience de soi se trouve une consistance, pas par le registre du désir et de la frustration qu surtout quand ils sont excessifs, se révèle vraiment versatile. Parce que la responsabilité et la culpabilité contiennent le su et, pas le désir et la frustration.

D’une part, le point de convergence est le fonctionnement de la conscience interne de l’Ego qui entre dans le processus d’élaboration de l’éthique. L’Ego s’oblige à connaître sa modestie, à reconnaître l’existence de l’autre et enfin à se le représenter dans une relation pour agir. C’est la prise en compte de l’Alter ego. La construction d’un altruisme posé à côté de l’égotisme, constitue la base de cette éthique. Toutefois, la conscience interne de l’Ego de lui même bute nécessairement sur ce qui le constitue en soi : il doit transcender sa puissance issue d’une pulsion d’être, dans l’élaboration de cette éthique. L’Ego aura toujours du mal à lâcher prise, et à se détacher de ce qui lui fait miroir, son narcissisme.

D’autre part, l’apparition du symptôme se trouve dans la manière d’être et de faire de l’Ego, la manière dont cet Ego se représente cette situation complexe, et le solutionne douloureusement par des attitudes toujours provisoires. Finalement, la tradition clinique place la responsabilité ou la culpabilité dans la névrose ou la psychose comme des figures de styles par la manière dont le souffrant s’approprie son récit pour s’en sortir.

À propos de la culture asiatique, notamment vietnamienne.

En Asie, et particulièrement au Vietnam, la représentation du monde est duelle et dialectique. Le langage symbolique emprunte une structure particulière pour exprimer la situation qu’une traduction simplifie souvent. Un concept psychologique combine souvent deux notions associées.

« Toi loi » met côte à côte le mot « Toi » qui signifie la faute, avec le mot « Loi » qui veut dire l’Erreur. Dans quelle circonstance les utilise t on ?

Seule une situation hiérarchique de jugement sans équivoque, permettra de dire : ça, c’est la faute (Toi), ça c’est l’erreur (Loi). Dans les autres cas, notamment dans les relations interpersonnelles, le vocable « Toi loi » est préféré. L’élève vietnamien qui fait des fautes d’orthographe, n’a commis que des erreurs d’écriture (loi chinh ta : erreur sur l’écriture officielle, principale, au sens étymologique de l’orthographe).

Au mot « Toi loi », le mot qui peut s’y associer serait le « Loi lani » : « loi » pour l’erreur, et « Lam » pour Perrement, la méprise. Dans la même suite, le mot « Lam lan » combine le sens du mot méprise (Lam) avec « Lan » qui veut dire le mélange. Puis il y a « Lan lon »= mélange renversement, et « Lon xon »= renversement trouble. (« Xon » employé seul, signifie grossier).

Nous avons ainsi cette chaîne signifiante psychodynamique :

Toi loi = Faute erreur ;

Loi lam. = Erreur méprise ;

Lam lan = Méprise mélange ;

Lan lon = Mélange renversement.

Lon xon = Renversement trouble.

On emploie le vocable de « Trach nhiern » pour la traduction du mot de responsabilité. « Nhiern » qui s’emploie rarement seul, veut dire le mandat, la mission, une chose confiée. Cette notion est encadrée en principe dans le temps. « Trach » peut avoir deux sens liés. Employé comme substantif, le mot signifie le devoir ; employé comme verbe ou 4ectif, c’est assumer un devoir qui accompli, produit ses jugements annexes : (se) plaindre et (se) reprocher, par rapport aux conséquences de la mission.

Ces conditions psycholinguistiques précisées, le vietnamien commun utilise le mot « tinh than trach nhieni » qui veut dire littéralement « l’esprit de la mission réalisée ». On s’écarte de ce qui serait un jugement du sens ou du sentiment de responsabilité. Il emploie le mot « Mac cam toi loi » pour parler de la situation de culpabilité. « Cam » en vietnamien est le ressenti, le préfixe « Mac » dérive phonétiquement de « Muc » (ancien vietnamien) qui veut dire la limite. « Mac cam » signifie au sens propre la limite perceptible du ressenti, la traduction de « mac cam. » par sentiment ne tient pas compte de cette notion très classique dans la tradition subjective asiatique, qu’est la lucidité devant la sensation (Cam giac) et la perception (Tri giac).

Voilà ce qui révèle autrement la place de la culture.

La question de l’erreur est centrale en Asie. Elle introduit le problème de la lucidité, sa reconnaissance, c’est à dire la question de la prise de conscience. On peut aussi parler d’accès, comme telle chose déjà présente qui devient accessible à l’humain. C’est donc à ce propos que l’enseignement bouddhique donne à l’ignorance, la fonction essentielle de la volition d’aller vers le perfectible et discute ce que lui semble être son moteur : quelle est la nature de l’Ego ? Le socle de référence est le Karma.

Certes, l’homme agit par curiosité. Il désire en savoir plus, assurément. On peut qualifier cela de pulsion d’être de l’Ego qui se certifie par la question de l’Avoir. Le comportement d’appropriation et toutes les sortes de dévorations au sens propre comme au sens figuré, introduisent la question de la prise de conscience de la limite séparant un dedans d’un dehors (donc de l’identité), puis celle du jugement de la responsabilité ou de la culpabilité à partir de la curiosité comme forme puissante du désir d’appropriation.

Selon l’enseignement bouddhique, l’homme avance, moins pour dévorer que pour faire reculer son ignorance. B avance autant dans sa tête (la mentalisation) que par le comportement (l’agi mental= la verbalisation, l’agi moteurle comportement). Toutefois, il va se rendre compte que plus il sait, moins il sait. Cest comme une lumière qui avance dans l’obscurité qui se reforme après le passage. Ce constat est différent de la proposition d’un Ego accumulateur qui s’étale par sa pulsion désirante : plus je veux, plus j’en veux encore. Ce constat oblige l’Etre à se distinguer de ses attributs qui le certifient par un Avoir. En conséquence de quoi, l’Ego a à apprendre la modestie et la compassion avant toute référence à soi qui ferait naître un sentiment ou un sens d’une faute ou d’une responsabilité. La propédeutique forme la psyché. L’Ego n’est pas soumis, au moins à ce niveau, à la question de la frustration qui surviendra après, quand l’Ego s’assimile à l’Avoir. L’Ego se rend d’abord compte quil est mouvement parce qu’il s’adapte et fait écho, c’est ce que l’enseignement qualifie aussi de « l’illusion de l’Ego » . Cette propédeutique est ainsi un enseignement j is achevé.

L’homme agit, se bonifie pour réduire son ignorance. Ce manque à savoir se comble par du perfectible, moins par un Avoir du toujours plus qui réduirait l’humain en objet de connaissance. Ce désir en se réalisant, produit nécessairement de l’erreur. D’une part personne en peut prétendre embrasser toutes les conditions de la réalisation, sauf un Ego voulant se montrer tout puissant. D’autre part, cet homme ne saura jamais d’avance les résultats, encore moins par rapport à un modèle, sauf son ego se sentant mégalornaniaque. Donc, la position bouddhique indique qu’aucune personne (I’Etre) ne maîtrise ce qui émane d »elle, et par conséquent les conséquences de ses actes chez d’autres. On dit donc que la Saisie va avec la Non saisie, le Mental va avec le Non mental, et que l’Etre cohabite avec le Non être.

Ce manque à savoir concerne le domaine de la connaissance et lenvironnement naturel et humain dans lequel tout s’inscrit nécessairement Pour lutter contre cette angoisse, l’êûe humain agit dans une suffisance, la référence à un modèle de connaissance (qu’il peut créer et imaginer comme universel). Il invente ainsi par besoin, des institutions dont il se sent responsable. Quand il cherche dans l’Avoir pour en avoir, et donc pour être quelqu’un dans ce cadre, c’est qu’il se réfère à un immense Avoir, une sorte de réservoir infini dont le concepteur pourrait être lui même, ou dont le maître serait le divin qui le guidera à l’acquérir et lutter contre l’angoisse du manque à savoir sur les origines. Cest la question d’avoir pour soi, d’abord pour exister dans une procédure d’identification puis dans un processus d’identité. La personne se sentira en droit d’en être son responsable. Il ne lâchera rien, ou si peu. Or, le bouddhisme appelle toujours au lâcher prise te au détachement après ce parcours.

La position bouddhique concilie la modestie de soi avec la compassion pour l’autre. Il s’agit de situer sa place (la nature humaine de chacun) dans un espace cosmique partagé (la nature au sens général) afin que, ce que son être a déjà acquis de par sa présence, puisse être versé et partagé dans et parmi le monde. L’homme est monde, il est tout un monde énigmatique et il est comme tout le monde. On parle donc du patrimoine commun de l’humanité qui s’appelle le Karma, un immense héritage de toutes les générations passées. Sinon, chaque homme viendrait du néant et chacun devrait refaire, lui même et chaque fois, l’archéologie de tous les savoirs et réinventer la signification des mots. Il n’y aurait aucun miroir possible. Un nouveau né donne de la j oie, à son arrivée au monde. Il est joie et il est dans la joie. C’est un être humain. Et ce sont ses parents qui lui donneront aussi la première tétée et bien d’ autres bonnes choses. On ne peut pas le réduire à être un « animal » à élever qui cherche immédiatement le sein, et qui plus tard cherchera à recevoir des cadeaux par égoisme ou à créer des soucis à d’autres. La prééminence du don devance toujours la question de recevoir. Ic à l’instant unique de la naissance de tout un monde qui fait évènement, c’est le nouveau né et les parents qui ensemble se donnent réciproquement. C’est de leur responsabilité d’être humains (d’être des êtres humains). Traverser l’existence, c’est accepter la mission de transmettre le bien, dont on peut dire ici que c’est la véritable responsabilité d’hommes vis à vis de ce karma. Secondairement, viendra avec la réalisation, la fiustration qui est un état tout à fait ordinaire, irréductible, mevîtable. Il est impossible de minorer, pour ne pas mettre à égalité, la frustration par rapport au plaisir et la satisfaction (états qui viendront en surcroît, heureusement), mais d’admettre que la frustration est un aspect des souffrances banales. C’est le sens des énoncés du bouddhisme que l’existence est souffrance. L’homme a donc du mal à se délivrer de ses frustrations ordinaires quand il met au premier plan de ses preuves d’existence, la recherche du plaisir (à en avoir toujours plus pour être mieux encore= être éternel). Il dévore la vie, réclame sa part de responsabilité.

Donc, quand j’agis, je commets forcément des errements et des erreurs. La conscience de cette responsabilité inhibe, elle peut même bloquer le mouvement. Ce sont des formes de phobies. Cela m’obligera toujours à me perfectionner. L’illusion de mon Ego est de me croire très fort toujours capable d’afrxenter. Ces erreurs rejaillissent sur moi et d’autres, imprévisibles. Ces autres réagissent forcément et je m’en défends contre cel& C’est sans fin. En conséquence, cela va faire mal et du mal. C’est par ce détour, que se dégage l’idée éthique de la faute que chaque après coup de l’acte enseigne, sans nécessairement une référence à un Ego puissant, ni au péché. On parle donc de l’Ego modeste qui reconnaît son impact chez l’autre. Cet Ego ne peut se faire son idée qu’en élaborant l’idée de son Alter ego. On n’est pas dans le registre d’une culpabilité par rapport au divin (ou une conscience supérieure) mais par rapport au meilleur de soi. L’enseignement bouddhique appelle « la Nature de Bouddha en soi », la bonne partie toujours perfectible de soi qui permet la mise en oeuvre des désirs éthiques et altruistes, d’être le responsable de ses maladresses.

Quand on croit que la responsabilité se dégage de la culpabilité, on est dans une vue de l’esprit venant d’un Ego qui voudrait avoir raison pour se préserver. Toutefois, dans une réciprocité, la culpabilité engage ipso facto la responsabilité.

C’est pourquoi, le bouddhisme propose que l’éthique et l’altruisme soient les termes qui transcendent la question duelle entre la culpabilité et la responsabilité, entre le sentiment et le jugement, c’est à dire le spontané et le travaillé. Pour arriver à cela, le moyen terme serait de considérer que toute faute serait une erreur dans une éthique qui se construit.

Conclusion.

On en revient ainsi à la parabole du voleur que je vais vous raconter à ma manière.

Un jour, assis au bord de la route, on demandait à Bouddha d’arrêter la personne qui venait de voler et qui allait passer devant lui en courant. À la question de savoir pourquoi devoir le faire, on lui dit que c’est un voleur. Bouddha devait répondre qu’il n’a vu personne.

Si vous appelez le voleur, voleur et le volé, volé, vous êtes prisonnier du langage et de son effet de sens. Vous ne vous êtes pas soucié de celui qui a faim et qui souffre et vous vous êtes pris de peine pour celui qui possède sans partager. En vérité, vous étiez le gardien des marchandises et vous n’avez pas vu les hommes. Vous n’avez pas regardé les souffrances ordinaires et vous vous êtes occupés des douleurs de perdre et de manquer, cela commence par les plus petites choses que vous possédez.

Commettons un anachronisme, et disons que ce bouddha là est non seulement coupable de mensonge mais responsable de complicité. Devons nous discourir seulement sur les circonstances atténuantes ?

C’est dire qu’il est toujours réducteur de traiter la question de la culpabilité et de la responsabilité en faisant abstraction du contexte (que je dirai également politique). Ou bien nous traitons cela comme un pur phénomène psychologique d’adaptation de tous les hommes semblables entre eux, sans leurs références culturelles. On serait devant l’homme idéal. Ou bien, nous sommes prisonniers des attributs institutionnels dits juridiques qui, en formulant le condamnable et le punissable, ont pris le dessus formel sur les attributions humaines qui construisent l’idée du Juste.

Aussi, acceptons par cette question de la responsabilité et de la culpabilité, d’être devant un traitement de l’utopie, soit par excès, soit par défaut. Le lieu commun dirait donc qu’il faille assumer cette situationLe lieu privé balance toujours entre le renoncement ou la résignation de la pulsion de penser ou d’agir qui engagerait de toutes les façons ce devoir d’assumer.

Un Ego arrogant qui ne réduit pas son narcissisme, doit supporter la loi interne du Juste et externe de la Justice. On est tout le temps dans un conflit d’élaboration de l’éthique : une tergiversation entre culpabilité et responsabilité n’est qu’un épiphénomène, un écran de fumée qui entretient la souffiance ordinaire des pulsions désirantes dans un cycle récurrent L’enseignement bouddhique nomme cette récurrence, le cycle des Productions Conditionnées.

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