Canal Psy, A Review of Psychiatrist Expert, n° 5, partie II : « Troubles dépressifs & approches dimensionnelles aujourd’hui »

Editions du Monde Moderne.

L’objectif de Canal Psy « A Review of Psychiatrist Expert » est de réunir dans chaque numéro thématique, rédigé en toute liberté d’esprit et d’opinion, l’essentiel des différentes spécialités intéressant la psychiatrie.

ÉDITORIAL

Il n’est pas question de remettre en cause l’intérêt d’une approche catégorielle des troubles psychiques. Cette approche permet des entités nosographiques clairement repérées et indépendantes les unes des autres. Elle trace une ligne de séparation franche entre normal et pathologique. Elle a aussi l’avantage d’autoriser une grande fidélité interjuges.
Mais cette méthodologie critériologique a ses limites. Elle fait perdre en finesse clinique ce qu’elle fait gagner en reproductibilité du diagnostic. De plus, cette démarche nosographique s’est avérée peu fructueuse dans les champs de la psychopharmacologie et de la psychiatrie biologique. L’approche dimensionnelle s’oppose à cette approche catégorielle. Elle se propose de sortir de ces grandes entités nosographiques pour tenter de décortiquer la sémiologie en plusieurs dimensions situées au plus près de la complexité de la clinique. Ces dimensions fondamentales ne seraient plus spécifiques de telle ou telle entité nosographique, mais pourraient être communes à différents états pathologiques dans une perspective transnosographique. Elles seraient donc des variables continues, partagées par l’ensemble des sujets et inscrites dans un continuum du normal au pathologique.
La psychopharmacologie a grandement bénéficié de cette approche dimensionnelle. Le psychopharmacologue a identifié des produits biochimiquement de plus en plus propres. Pour mieux repérer les cibles cliniques pertinentes de ces nouveaux produits, le psychiatre clinicien doit proposer une lecture plus fine de la sémiologie. De la même façon, la psychiatrie biologique a considérablement progressé dans la mesure où elle est sortie de l’impasse qui consistait à tenter de corréler un marqueur biologique donné et une entité nosographique pour se rapprocher de la notion de dimension. À titre d’exemple, le dysfonctionnement sérotoninergique est le témoin non pas d’un cadre nosographique tel que la dépression majeure dans son ensemble, mais plutôt d(‘une dysrégulation émotionnelle et comportementale telle que la dimension trouble du contrôle de l’impulsivité. Le même raisonnement s’applique pour l’hypofonctionnement dopaminergique et l’émoussement affectif. En résumé, cette approche dimensionnelle de la pathologie mentale permet de sortir du carcan d’un cadre nosographique rigide et simplificateur, de se rapprocher de la complexité de la clinique, de proposer des modèles cohérents pour la psychiatrie biologique et de mieux repérer les cibles cliniques pertinentes pour les nouvelles molécules.

J. DALERY
Hôpital P. Wertheimer-Louis-Pradel, Lyon.

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