Editions scientifiques L & C, décembre 2006.
Christophe ANDRÉ est médecin psychiatre dans le service hospitalo-universitaire de l’hôpital Saint-Anne, à Paris.
INTRODUCTION
« L’esprit sera toujours la dupe du cur », écrivait La Rochefoucauld. Lorsque nos émotions s’activent, elles commencent toujours par prendre l’ascendant sur notre intelligence. Pour le meilleur (la vivacité de réaction, l’intuition, l’aide aux processus décisionnels) ou pour le pire (les troubles émotionnels).
Dans la maladie dépressive, c’est une tistesse inappropriée, trop intense, trop durable, qui semble prendre le pas sur le psychisme du patient. Mais à y regarder de plus près, il n’y a pas que la tristesse : il y a aussi une dérégulation de la peur (on sait que des attaques de panique sont présentes dans les tableaux dépressifs, et que différents symptômes anxieux y sont fréquents), de la honte, de la colère, parfois de l’envie… De nombreux et récents travaux ont confirmé et approfondi ces constations cliniques sur les perturbations émotionnelles présentes non seulement lors de l’épisode dépressif, mais aussi dans ses suites. La connaissance et la prise en compte de ces travaux amènent à une nouvelle lecture de la maladie dépressive et de sa prise en charge ; et permettent aussi de s’attacher à une cliniquedes émotions dans la dépression et dans son suivi, en se recentrant encore un peu plus sur la personnalité du patient.