CS – La Lettre du Psychiatre – Actualités p.12 (Éditions Vivactis Média copyright)

Le Courrier du Spécialiste, la Lettre du Psychiatre – Suppl. au N° 5 Vol I. Décembre 2005 :

ACTUALITÉS PROFESSIONNELLES PSYCHIATRIQUES EN EUROPE (copyright)

par H. Sontag

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ACTUALITÉS PROFESSIONNELLES PSYCHIATRIQUES EN EUROPE

Autriche : cohue allemande dans les facultés de médecine autrichiennes

- D’après le Frankfurter Allgemeine Zeitung, la Cour de justice européenne a rendu, en juillet 2005, un arrêt qui oblige l’Autriche à réserver aux personnes originaires des États membres de runion européenne, souhaitant faire des études supérieures sur son territoire, le même traitement qu’à leurs camarades autrichiens. Il faut savoir qu’il existe un numerus clausus pour les études en Allemagne qui est très rigoureux et, de ce fait, de nombreux étudiants allemands ne peuvent trouver de place dans les universités allemandes. Pour des raisons évidentes de langue, ils s’adressent souvent aux universités autrichiennes. Le nombre de places étant aussi limité dans les universités autrichiennes, les jeunes Autrichiens, qui ne fournissaient jusqu’à présent que le baccalauréat pour s’inscrire à l’Université, vont devoir aussi passer un examen d’entrée.

Cela a conduit le gouvernement autrichien à introduire des conditions d’inscription beaucoup plus strictes pour l’entrée en Faculté de médecine, et, dans le même temps, le chancelier Schüssel et le ministre de la Santé ont annoncé qu’ils souhaitaient que Bruxelles modifie les directives euro-péennes en prenant en compte les intérêts autrichiens, d’autant plus que d’après les traités européens, les fondements du système éducatif relèvent de la compétence exclusive des États nationaux. L’Autriche (avec le soutien de l’Allemagne) estime que la question de l’enseignement supérieur doit être discutée au niveau européen, ainsi que l’éventualité de faire participer un pays aux frais de scolarité de ses ressortissants étudiants à l’étranger. Le gouvernement autrichien demande que la Cour de justice euro-péenne reconsidère sa position. Trois solutions sont envisageables :

> « le principe du pays d’origine » de l’étudiant étranger qui prend en charge le coût de ses études. Ce projet a été rejeté par l’Allemagne en raison des lourdeurs administratives qu’il entraînerait ; > le retour au statu quo ante : les étrangers désirant s’inscrire à l’Université autrichienne devraient justifier d’une admission dans une université au sein de leur pays d’origine ; > on peut envisager d’instaurer un quota d’étudiants étrangers, mais c’est une possibilité qui n’a aucune chance de passer d’après les juristes, car ce serait une discrimination qui serait considérée comme contraire au droit communautaire.

À titre d’exemple : la faculté de médecine d’Innsbrück, qui dispose de 550 places à la rentrée universitaire, a été demandée par 447 Autrichiens, 2 147 Allemands, et 86 Tyroliens du Sud (partie annexée par l’Italie en 1918, à titre de dédommagement, mais qui est germanophone et qui bénéficie d’un statut d’autonomie particulier permettant, entre autres, la reconnaissance totale de ses diplômes depuis longtemps) et 55 personnes originaires d’autres pays de l’Union européenne.

Le principe du « premier venu, premier servi » est celui qui est employé et les candidats s’inscrivent dans la cohue la plus totale, quitte à dépêcher une personne munie d’une procuration ou à s’inscrire par correspondance, puis les candidatures valables sont dépar-tagées par le cachet de la poste àrheure près ! En 2004, sur 565 places en médecine, 438 ont été attribuées à des Autrichiens, 34 à des Allemands, 87 à des Tyroliens du Sud et 6 à des jeunes originaires d’autres pays de l’Union européenne.

Il faut rappeler que les études de médecine sont plus longues qu’en France ; en ce qui concerne la spécialité de neuropsychiatrie – la psychiatrie n »étant pas séparée de la neurologie -, il faut compter entre 7 à 9 ans de spécialisation, ce qui crée d’énormes difficultés pour trouver des stages formateurs. Il n’est donc pas rare de rencontrer des chauffeurs de taxi à Vienne qui sont des médecins attendant de trouver une place pour effectuer leur stage de spécialisation !

Allemagne : la contestation contre les réformes continue

- Après l’application de la baisse des salaires des médecins des hôpitaux et le non-paiement de leurs heures supplémentaires entraînant une baisse des salaires nets de 7,5 % sur 10 ans -alors que les professeurs ont vu le leur augmenter de 3 % sur la même période -, les manifestations de pro-testations se succèdent en Allemagne.

En effet, les salaires des médecins hospitaliers seraient parmi les plus bas d’Europe, derrière rEspagne, le Dane-mark, la Suède et l’Italie, selon le collectif des médecins de l’hôpital de la Charité (le plus important de Berlin). Les médecins des hôpitaux et des cliniques privées allemands sont 146000 et ils effectuent en moyenne plus de 50 millions d’heures supplémentaires qui ne sont pas payées, selon certains syndicats allemands. Des manifestations (peu suivies, par ailleurs) se sont déroulées à Berlin et à Leipzig.

Les médecins hospitaliers français peuvent se consoler sur leurs salaires : leurs confrères allemands sont encore plus mal lotis qu’eux, et, au moins, on ne leur diminue pas leur salaire en augmentant leurs heures de travail, ce qui n’empêche pas que leur salaire n’augmente sûrement pas en fonction du coût de la vie…

La psychiatrie dans les nouveaux États membres de l’Union européenne

- Un groupe de psychiatres et de responsables de la santé mentale des nouveaux pays entrant dans l’Union européenne s’est réuni à Luton (Bedfordshire, Royaume-Uni), les 17 et 18 septembre 2004, pour envisager des interventions précoces dans les maladies psychotiques. Les nombreuses disparités existant aussi bien au niveau des populations que des prises en charge psychiatriques des différents États membres de l’Union européenne ainsi que la question des crédits accordés à la santé mentale ont été abordés durant cette réunion. Il a été mis en évidence que plusieurs des nouveaux États ont besoin de développer l’investissement et la formation.

Pour arriver à de tels buts, il est nécessaire de partager les idées et l’expérience déjà acquise par des autres États ; les délégués sont très favorables à contribuer au développement de services de psychiatrie modernes et sont prêts à s’impliquer dans une future coopération pour développer de tels services en créant un groupe de travail qui soutienne les projets des uns et des autres.

Tout cela demande des projets de recherche conjoints, des mises en commun d’expérience et de formation aussi bien pour les responsables médicaux que pour les responsables administratifs, des échanges et des visites à court ou long terme, des par-tages de connaissances et d’expertises en développant des protocoles conjoints pour le diagnostic de la maladie ou le traitement des malades. Elle propose aussi un jumelage de services de différents pays et le développement d’interventions psychosociales et familiales pour les malades en échangeant des informations épidémiologiques sur les registres de cas connus et en tenant une conférence annuelle ainsi que des congrès sur des points particuliers d’intérêt mutuel.

Ils espèrent que de telles activités pourraient exister dans les programmes de l’Union européenne (tout en sachant que ceux-ci sont pour le moment bloqués par le manque de volonté politique résultant des refus d’une constitution commune). En attendant, ils proposent que ce groupe de collègues auto nommé « groupe de Luton » puisse créer un secrétariat basé au centre du Bedfordshire pour la recherche en santé mentale en association avec l’universitéde Cambridge. Ils sont prêts à accepter toute communication de collègues ayant un intérêt similaire.

Pour en savoir plus… référence : Marusic British Journal of Psychiatry. (E-mail : mark.Aguis@blpt.nhs.uk)

Différences dans la perception de l’hospitalisation sur demande d’un tiers en Europe, d’après le British Journal of Psychiatry

- Dans un article signé Salize et Oressing, il est fait état de grandes variations d’un Etat membre à rautre par rapport à l’hospitalisation sur demande d’un tiers (HOT) dans l’Union européenne ; elle passe de 6 pour 100000 habitants au Portugal à 218 pour 100000 habitants en Finlande. Cette tendance s’expliquerait en partie par les grandes disparités qui existent au niveau des lois et des instruments légaux des différents pays, mais en partie seulement. En effet, d’autres facteurs tels que des considérations économiques ou sociales éclairciraient aussi ce fait. On manque d’éléments sur refficacité de mesures de coercition, qui n’ont pas de fondement évi-dent. On note aussi qu’il n’y a pas non plus de modèle fondé sur l’évidence dans l’utilisation de la coercition en psychiatrie du fait de difficultés éthiques à étudier l’efficacité de telles mesures, par exemple en utilisant des échelles ou des schémas randomisés. Il serait intéressant de trouver un moyen pour prouver l’efficacité de l’HOT chez des patients qui représen-tent peu de danger pour eux-mêmes et pour les autres.

Il est évident que les patients présentant des troubles psychotiques avec un risque social ainsi qu’une absence de motivation à un traitement, pourraient bénéficier de mesures de coercition beaucoup plus facilement que ceux qui ont de simples troubles de la personnalité.

En conclusion de cette étude, il semble important que des instruments efficaces de mesures valables puissent être trouvés pour décider de l’utilisation de la coercition ; ces instruments devraient inclure la sévérité des troubles psychiatriques, le danger des patients pour eux-mêmes et pour les autres, ainsi que la motivation au trai-tement. Il y a une réelle demande de collaboration européenne entre des groupes de travail qui s’i ntéresseraient à ce problème.

Pour en savoir plus…, http://europa.eu.int/comm/health au Central Institute of Mental Health à Mannheim

Parlement européen : les eurodéputés s’inquiètent des médicaments édiatriques

- Partant de la constatation que les médicaments pédiatriques n’ont jamais eu d’essais cliniques et que de ce fait, ils n’ont reçu l’aval d’aucune Commission d’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans les conditions analogues aux médicaments pour radulte, les eurodéputés ont voté une directive qui vise à favoriser des essais cliniques chez renfant. Dans ce but, ils demandent qu’un budget spécial soit prévu et que tous les médicaments, qui jusqu’à présent étaient prescrits chez l’enfant à raison de doses inférieures à celles pour radulte sans aucun contrôle, soient testés. Cette directive correspond aussi à une modification de la « Food and Drug Administration » américaine qui est actuellement en train d’effectuer, sur une large échelle, des études sur l’en-fant. Cette directive s’appuierait sur une réglementation précise afin d’avoir l’accord des parents et des professionnels.

Il est aussi souligné que, dans le domaine psychiatrique, le manque se fait cruellement sentir, car les psychiatres européens se heurtent souvent à une AMM très stricte, et il leur faut souvent s’appuyer sur des travaux américains ou autres pour pouvoir justifier des prescriptions de psychotropes chez l’enfant. Cette directive doit encore avoir l’aval de la Commission européenne avant une éventuelle publication, mais compte tenu de l’urgence, et à la demande des gouernements des États membres, elle pourrait voir le jour courant 2006.

Espagne : analyse des moyens en santé mentale

- Un observatoire de la santé mentale a été créé en Espagne sous la direction d’Isabel Salvador qui a rendu son rapport en mars 2005 : somme importante de travail de plus de 150 pages. Nous pouvons mettre en évidence un certain nombre de données concernant les psychiatres espagnols. Tout d’abord, il faut savoir que le système de santé était extrêmement centralisé jusqu’au changement de régime politique. La loi royale générale de santé de 1986 a donnéà chaque « communauté autonome » son propre système, sa propre gouvernance et des moyens financiers pour assurer ce changement. L’Espagne est actuellement divisée en 18 communautés autonomes dont les seuls points communs sont : le roi, les Cortès (parlements), une monnaie et un système de défense communs pour ce qui est de l’Espagne en général (avec pour chaque communautéune police autonome) et un certain nombre de points donnant à l’État une forme plus ou moins fédérale. De ce fait, il a fallu transformer le système national de santé en créant un Conseil interterritorial qui fait la coordination entre les communautés autonomes et l’état.

Grâce à la loi de cohésion et de qualité du système national de santé, un observatoire du système national de santé a été créé, dépendant du ministère de la Santé et de la Consommation et qui donne une idée de ce qui se passe dans les communautés autonomes.

On est un peu étonné de ne pas trouver dans ces 152 pages des statistiques globales concernant le nombre de psychiatres, même si ron trouve le pourcentage de psychiatres par rapport au nombre d’habitants de chaque communauté autonome. Par exemple, ce pourcentage est de 5,28 pour 100000 habitants en Andalousie, de 10,80 en Catalogne et de 2,64 (chiffres très bas) pour 100 000 habi-tants à Valence.

Il est difficile de faire un total dans la mesure où il faudrait connaître exactement la population de chaque communauté, ce qui n’est pas indiquédans cet observatoire, mais on peut tout de même noter qu’il y a de très grandes différences entre certaines communautés, qui sont bien fournies en psychiatres, et d’autres, qui ne le sont absolument pas.

Il existe à peu près partout une planification avec un plan de santémentale qui est une absolue nécessité dans toutes les communautés, excepté pour cinq régions. Ce travail extrêmement complet pèche par le manque de données totales, que ce soit pour le nombre d’hôpitaux psychiatriques (certaines régions n’ont plus d’hôpitaux pour des raisons de réorganisation en petites unités intégrées au sein des villes ou d’hôpitaux généraux) que pour le nombre d’infirmières ou de travailleurs sociaux. Pour en savoir plus… Revue Revista de l’Association espagnole de neuropsychatrie, volume XXIV, n° 93 janvier/mars 2005.

La Lettre du Psychiatre – Suppl. Les Actualités au vol. I – n° 5 – décembre 2005, p. 12 (copyright)

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