E. BACON : « Les psychiatres peuvent-ils voir la folie en peinture ? »

In : La Lettre du Psychiatre – Suppl. Les Actualités au vol. II – n° 3 – Juin 2006 : p. 8

Pittsburgh (États-Unis).

Il est une croyance largement répandue selon laquelle la maladie mentale se reflète dans les œuvres des artistes atteints de psychopathologies. Citons pour exemple la période « bleue » de Van Gogh, qui correspond à une phase de dépression, alors que la phase maniaque du trouble bipolaire de l’auteur se reflète dans ses peintures de la période « rose ». Toutefois, lorsqu’ils ont interrogé douze psychiatres en leur demandant d’évaluer des peintures choisies au hasard et dont les créateurs étaient soit des individus sains, soit des sujets atteints de schizophrénie et de troubles bipolaires (n = 10), les Dr A. Rao et M. Keshavan ont constaté que les médecins n’étaient pas capables de différencier les peintures d’artistes sains ou malades. Ils ont alors sélectionné des peintures de trois artistes connus présentant un trouble bipolaire (Edvard Munch, Vincent Van Gogh et Mark Rothko). Ils ont d’abord présenté une seule peinture, puis un ensemble de dix peintures de chaque artiste, à des psychiatres et à des sujets non spécialistes appariés selon leur niveau d’éducation. La question posée à chaque fois était la même, à savoir qu’il était demandé aux personnes participant au test de déterminer si la période de création de l’œuvre était antérieure ou postérieure à la survenue de la psychopathologie. Les psychiatres ont toujours été capables de distinguer les œuvres antérieures et postérieures au déclenchement de la maladie, que les peintures leur aient été présentées individuellement ou en ensembles. En revanche, les autres observateurs, s’ils ont été capables de dater les œuvres lorsqu’elles étaient présentées ensemble, n’ont pas pu faire la distinction lorsque les peintures leur étaient présentées séparément.

Commentaire

La réponse à la question est donc : oui, les psychiatres seraient capables de reconnaître la maladie mentale dans les peintures. Cette capacité présente une signification clinique potentielle, et il serait intéressant d’étendre une étude de ce type à des œuvres d’artistes moins connus.

Aller au contenu principal