Elaborer ensemble une stratégie pancanadienne en santé mentale pour la population du Canada par l’Association candienne pour la santé mentale (ACSM)

Présenté à Comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie, Mai 2000

Aperçu du mémoire

Depuis 18 mois, le Comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de l technologie étudie le dossier de la santé mentale et de la maladie mentale. L’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM) est heureuse de constater que le Comité se penche sur cette importante question dans notre pays.

L’ACSM fait partie du grand secteur bénévole et communautaire au Canada. Regroupant plus de 175 000 organismes canadiens à but non lucratif (organismes de bienfaisance) dont les avoirs atteignent plus de 109 milliards de dollars, et les revenus annuels, plus d 90 milliards de dollars, le secteur joue un rôle important dans le tissu social du Canada Le secteur bénévole et communautaire est souvent appelé le troisième pilier car il emploie plus d’un million de personnes à qui il verse chaque année 40 milliards d dollars en salaires et en avantages sociaux.

En réponse à l’invitation à comparaître devant le Comité sénatorial, l’Association canadienne pour la santé mentale a préparé le présent mémoire qui contient ses recommandations.

Qu’est-ce que l’ACSM ?

L’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM) est un organisme bénévole national qui prône une meilleure santé mentale chez chacun et qui aide les personnes atteintes de maladie mentale à combattre et à surmonter leur maladie. L’ACSM accomplit sa mission en élaborant des politiques publiques, en informant la population, en défendant les intérêts du secteur, en faisant de la recherche et en offrant des services. Grâce à son réseau qui compte 12 divisions provinciales et territoriales et quelqu 125 filiales/régions, et aux consultations étroites qu’il mène auprès des usagers, de familles, des professionnels et des autres organismes intéressés, l’ACSM réunit de l’information sur une grande diversité de questions et de préoccupations qui touchent la population canadienne en matière de santé mentale.

Recommandations

L’Association canadienne pour la santé mentale fait cinq (5) grandes recommandation au Comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie : a) Élaborer et mettre en œuvre une stratégie nationale pancanadienne en matière de santé mentale b) Donner suite à l’engagement qu’a pris le Conseil des premiers ministres en matière de santé mentale communautaire c) Veiller à ce que la stratégie nationale tienne compte des enfants et des jeunes, des Autochtones, des femmes et des nouveaux immigrants d) Veiller à ce que la stratégie nationale tienne compte du problème du suicide e) Veiller à ce que le secteur bénévole oeuvrant dans le milieu de la santé mentale puisse participer davantage à l’élaboration d’une politique publique

Rôle du secteur bénévole et des autres organismes non gouvernementaux qui oeuvrent en santé mentale

Le secteur bénévole dans son ensemble

Le secteur bénévole est appelé le troisième pilier. Au Canada, il y a plus de 175 00 organismes à but non lucratif, dont plus de 80 000 sont inscrits comme organismes d bienfaisance auprès de l’Agence du revenu du Canada. Avec des recettes annuelles de plus de 90 milliards de dollars et des avoirs s’élevant à 109 milliards de dollars, le organismes de bienfaisance se comparent par la taille à l’économie de la Colombie-Britannique. Même si 60 % environ des revenus du secteur de la bienfaisance proviennent d’établissements d’enseignement et d’hôpitaux, le secteur compte pour approximativement le huitième du produit national brut du Canada. Les deux tiers des organismes de bienfaisance canadiens ont des revenus annuels de moins de 100 000 $, e la moitié ont des revenus de moins de 50 000 $ par année

Le secteur bénévole est un gros employeur au Canada, comptant plus de 1,3 millio d’employés affectés à diverses fonctions au sein du secteur. Cela représente quelque 9 de la population active du pays et plus de 40 milliards de dollars par année en salaires e avantages sociauxii. Le Canada est fier de sa très longue tradition en matière de bénévolat. Réalisée par Statistiques Canada dans le cadre de sa participation à l’Initiative du secteur bénévole, l’Enquête nationale sur le don, le bénévolat et la participation a révélé que près de 22 millions de Canadiens, soit 91 % de la population de 15 ans et plus, ont fait des don en espèces ou en nature à des organismes à but non lucratif, y compris des organismes de bienfaisance. Près de 70 % (8 sur 10) ont fait des dons directs en espèces ; 41 % on déposé de l’argent dans de petites caisses à la sortie de magasins et quatre pour cent on déclaré avoir fait un don à un organisme de charité dans leur testament. Les dons en nature sont aussi très courants : 60 % des répondants ont donné des vêtements ou de articles ménagers, et 50 % de la nourriture, à un organisme de bienfaisance

On évalue à 5 milliards de dollars environ le total des dons en 2000, ce qui représente un hausse de 11 % par rapport à 1997. Le don moyen a augmenté de 8 % en 2000, passant 250 $, avec un nombre moyen de 3,7 dons par donneur. À noter toutefois que 82 % de dons en argent faits à des organismes de bienfaisance canadiens provenaient du quart de tous les donneurs durant la période viséeiii. Aider les consommateurs et les familles aux prises avec la maladie mentale et la toxicomanie

Plusieurs organismes oeuvrent dans le secteur de la santé mentale. Le rôle des ONG dans le milieu de la santé mentale est essentiel pour assurer la continuité des services. En 1984, reconnaissant l’importance des consommateurs et des familles aux prises ave la maladie mentale, l’ACSM a élaboré une structure de soutien originale. Cette structure propose un modèle comportant une base de ressources communautaires et a été additionnée d’une base de connaissances en 1993. On songe actuellement à intégrer dan la structure de soutien une base de ressources personnelles.

La Structure de soutien reconnaît l’importance des consommateurs et des familles qu sont aux prises avec la maladie mentale, dans tous les secteurs : soutien des pairs promotion et élaboration d’une politique publique ; accès aux traitements et services et amélioration de ceux-ci ; soutien à la recherche ; sensibilisation du public et réduction de la discrimination et des stigmates. Dans le numéro de 2004 de la Structur de soutien (à paraître sous peu), l’ACSM fai reposer son approche au soutien à la maladie mentale sur la Base de ressources communautaires (BRC). La BRC indique que l’aide aux usagers et aux familles est du ressort d’un éventail de groupes d’intervenants appartenant, sans s’y limiter, au système de services officiels. Outre les services officiels, la BRC reconnaît l’importance du rôle que jouent les usagers et les familles elles-mêmes ainsi que les autres groupes et organismes communautaires dans la prestation de l’aide aux personnes atteintes de maladie mentale et la promotion de leur intégration, et souligne que les intérêts et les choix du consommateurs doivent demeurer au cœur de nos préoccupations.

Pour établir une Base de ressources communautaires optimale, il importera de réinvestir les retombées dans la collectivité : dans la capacité des usagers et des familles à s’aider eux-mêmes, dans la réforme des systèmes de services et dans l’établissement de stratégies d’adaptation positive.

La Base de ressources personnelles permet de comprendre les éléments personnels sentiment d’identité, raison d’être, compréhension de la maladie et sentiment d’appartenance contribuant au rétablissement des personnes atteintes de maladie mentale dans le cadre d’une collectivité aidante. La Base de connaissances permet de comprendre ce que sont la maladie mentale et la santé mentale et d’y réfléchir. En répertoriant un éventail de perspectives, médicales et cliniques, expérimentales, sociologiques et traditionnelles, la Base de connaissances permet de se documenter de façon à proposer des plans et des politiques de recherche, ainsi que des programmes et des services, plus pertinents.

Même si l’ACSM reconnaît qu’elle n’accorde pas autant d’intérêt à la toxicomanie qu’à la maladie mentale, ce n’est pas une raison de négliger cette dernière. Des travaux ont été faits dans ce domaine, et l’Association se penchera sur la question dans le contexte de ses orientations stratégiques pour les années à venir. Recommandations : Que le gouvernement fédéral prenne l’initiative d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie nationale pancanadienne en santé mentale, à compter de l’exercice financier 2005-2006.

Que toute stratégie nationale pancanadienne en santé mentale tienne compte de la situation des enfants et des jeunes, des Autochtones, des femmes et des nouveaux immigrants.

Qu’on tienne compte de la gravité de la question du suicide chez les personnes atteintes de maladie mentale dans l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie nationale pancanadienne en santé mentale.

Élaboration d’une politique publique

Le rôle du secteur bénévole et des autres organismes non gouvernementaux en matière d’élaboration d’une politique publique est capital. L’élaboration de politiques publiques se fait à tous les niveaux de gouvernement : fédéral, provincial, régional et municipal Les organisations de bénévoles apportent un éclairage unique quand il s’agit d’élaborer une politique publique saine. Dans l’élaboration d’une politique publique, il importe de tenir compte du point de vue des usagers et des familles. Même si parfois les points de vue sont irréconciliables, le gouvernement doit comprendre les préoccupations des intervenants afin d’élaborer la meilleure politique publique possible.

Toutefois, un des plus grands défis que doit relever le secteur bénévole en matière de santé mentale, c’est celui de se doter de moyens. La plupart des organismes sont très petits, de sorte qu’ils n’ont pas les moyens de participer activement à l’élaboration des grandes politiques publiques qui les toucheront. Le gouvernement fédéral doit s’engager auprès du milieu de la santé mentale au Canada à fournir, individuellement et collectivement, à tous les moyens de participer activement à l’élaboration de toute politique publique.

L’Association canadienne pour la santé mentale a participé à l’élaboration de politiques publiques au fil des ans en produisant des documents de travail, en publiant des déclarations de principe, en présentant des mémoires aux comités permanents de la Chambre et du Sénat, et en tissant des liens avec les personnes clés à l’intérieur et à l’extérieur des administrations publiques, pour leur faire part des grandes préoccupations de ses membres. Sans que cela ne remette en question le rôle de l’organisme dans le domaine, l’ACSM manque sérieusement de moyens pour participer pleinement à l’élaboration de politiques publiques, quel que soit le niveau de gouvernement. Depuis deux ans, l’Association canadienne pour la santé mentale a pris les devants et a lancé son projet « Les Citoyens pour la santé mentale » afin de se doter et de doter le secteur bénévole en général des moyens nécessaires pour participer à l’élaboration d’une politique publique en santé mentale.

Recommandation Que le gouvernement fédéral, dans le cadre de son engagement envers le milieu de la santé mentale, dote les organismes bénévoles oeuvrant en santé mentale de moyens accrus afin qu’ils participent davantage à l’élaboration d’une politique publique saine. Amélioration des traitements et des services L’accès aux traitements et aux services est déterminant pour les usagers et les familles. On rapporte souvent combien les traitements et les services offerts dans les collectivités sont insuffisants, ce qui entraîne parfois des conséquences des plus tristes et des plus tragiques. Au fil des ans, les traitements et les services offerts aux usagers et aux familles ont été améliorés, mais ils sont loin d’être suffisants. Les personnes atteintes de maladie mentale sont aussi importantes que les autres Canadiens, et il convient donc de s’engager à offrir partout au pays une gamme complète de services et de traitements faciles d’accès.

Les quatre perspectives, médicales et cliniques, sociologiques, expérimentales et traditionnelles, sur lesquelles porte la base de connaissances de l’ACSM, définissent un cadre de réflexion concernant l’éventail de traitements, de programmes et de services dont les Canadiens ont besoin. Il importera de maintenir cette approche holistique tout au cours des efforts pour mettre au point des traitements et des services améliorés. Le gouvernement fédéral doit prendre les devants pour assurer un accès équitable aux services et aux traitements partout au pays. Il doit collaborer avec le Conseil des premiers ministres pour que celui-ci puisse tenir son engagement en matière de santé mentale communautaire. Recommandation Que le gouvernement fédéral s’engage à collaborer avec le Conseil des premiers ministres afin que celui-ci tienne son engagement en matière de santé mentale communautaire.

Aide à la recherche

La recherche – sous toutes ses formes – est un élément important de toute stratégie pancanadienne en santé mentale. Il importera de soutenir une approche stratégique et coordonnée en matière de recherche sur les problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Le gouvernement fédéral pourrait faire preuve de leadership dans ce domaine grâce aux divers services de recherche au sein de ses ministères, à ses organismes de recherche et à l’appui qu’il pourrait apporter à la recherche communautaire effectuée par divers organismes partout au pays. Il importe de ne pas limiter la recherche en santé mentale aux questions neurologiques, voire cliniques, mais de la faire porter également sur les questions communautaires et psychosociales. Sensibilisation du public, réduction de la discrimination et des stigmates

Les problèmes de santé mentale, et en particulier la maladie mentale, constituent dans le domaine de la santé le dernier bastion où on peut observer de la discrimination et des stigmates. Pour les personnes atteintes de problèmes de santé mentale, la discrimination continue et les stigmates qu’elle cause ajoutent au stress d’une situation déjà difficile à supporter.

En s’engageant à sensibiliser le public aux problèmes de santé mentale partout au pays, le gouvernement fédéral fera la preuve de son leadership et de sa détermination à réduire la discrimination et les stigmates dont souffrent toutes les personnes atteintes de problèmes de santé mentale.

Entre-temps, le gouvernement fédéral doit prendre l’initiative d’élaborer et de mettre en œuvre au sein de ses services des politiques appropriées visant à lutter contre cette discrimination et ces stigmates. Recommandations Que le gouvernement fédéral prenne l’initiative d’investir dans une campagne de sensibilisation du public multiniveau et pluriannuelle afin de réduire la discrimination et les stigmates.

Que le gouvernement fédéral revoie toutes ses politiques et ses pratiques au sein de son administration afin de lutter contre la discrimination et les stigmates.

Conclusion

L’Association canadienne pour la santé mentale s’engage à fournir les programmes et les services dont ses membres ont besoin partout au pays. Sa capacité de répondre aux besoins est toutefois tributaire de l’engagement qu’elle reçoit du gouvernement et du secteur privé. Le gouvernement fédéral peut l’aider en élaborant et en mettant en œuvre une stratégie pancanadienne en matière de santé mentale. Cette stratégie doit tenir compte des préoccupations des usagers, des familles et des autres intervenants, qu’ils appartiennent ou non au milieu de la santé mentale.

Le Canada a toujours été réputé sur la scène internationale comme étant un chef de file dans certains domaines. C’est en prenant l’initiative d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie nationale pancanadienne en santé mentale que le Canada prouvera à ses citoyens qu’il continue d’être non seulement un chef de file sur la scène internationale, mais aussi un chef de file compatissant à l’égard de la maladie mentale.

NOTES DE FIN

Consolider nos acquis : Pour une meilleure gestion et transparence au sein du secteur bénévole a Canada, Table ronde sur la transparence et la saine gestion dans le secteur bénévole, 1999ii Ibid. iii Canadiens dévoués, Canadiens engagés : Points saillants de l’Enquête nationale de 2000 sur le don, l bénévolat et la participation, Centre canadien de philanthropie, Bénévoles Canada, Patrimoine canadien, Santé Canada, Développement des ressources humaines Canada et Statistiques Canada, ministre de l’Industrie, 2001.

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