Editions Erès, 2006. 15 €
Sous la direction de Jean-Philippe RAYNAUD, Danièle GUILBERT & Jean-Claude CÉBULA.
Dans la première partie de ce numéro sur l’amitié, on perçoit qu’ainsi aller vers l’autre, c’est aussi aller vers soi. Très tôt, soutenus en cela par les adultes, les enfants élisent parmi leurs pairs ceux qui seront leurs copains, pour quelques jours ou pour la vie (H. Gane, C. Graindorge, B. Assezat). Les affinités, les sympathies, le plaisir de la réciprocité des liens et de l’attachement (R. Dugravier, N. Guedeney, A.-S. Mintz) se mettent en place très tôt et constituent un véritable théâtre du lien extrafamilial. Avec plus ou moins de satisfaction, plus ou moins de violence, les enfants découvrent, expérimentent, mettent à l’épreuve et échafaudent des amitiés, dans lesquelles ils engagent leurs assises narcissiques en devenir et qui, en retour, participent à leur construction (D. Brun, B. Assezat).
Quand vient le temps des copains, tous les professionnels de l’enfance savent à quel point, même si les émotions, les sentiments, les joies et les blessures sont vécus « pour de vrai », les amitiés constituent une sorte d’extraordinaire terrain de construction grandeur nature du sujet en devenir, de la qualité de ses relations aux autres, de sa différenciation. Que ce soit à l’école (E. Godeau, F. Navarro, C. Vignes), à l’occasion de confidences à un journal « ami » (S. Clochard, B. Carrère, Ch. Metzger) ou de questionnements sur le corps, la sexualité, l’accès à la parentalité (M. Prudhomme).
L’influence des pairs, en particulier à l’adolescence, est de mieux en mieux connue. Dans les actions de prévention visant les adolescents, on sait que faire passer des messages par les pairs est bien plus efficaces que tous les arguments des doctes spécialistes. On sait aussi qu’en matière d’expérimentations de toxiques, le rôle, dissuasif ou incitatif, joué par les pairs est bien supérieur à celui de l’entourage familial ou des professionnels. Ainsi, les mouvements d’identification se jouent largement en-dehors du théâtre familial, par exemple au sein de la bande ou de la tribu (J.-P. Le Run). À l’occasion des rencontres, la quête du semblable et de l’altérité est une aventure à la fois riche et risquée (J.-Ph. Raynaud).
Les relations interpersonnelles nous nourrissent et nous exposent, nous rendent à la fois plus forts et plus vulnérables.
(Article extrait de Nervure, Journal de Psychiatrie, n° 7 – Oct. 2006 : p. 9)