La situation des travailleurs migrants turcs en Europe

Assemblée parlementaire

Doc. 10358 rév. 25 novembre 2004

Proposition de recommandation présentée par M. Gülçiçek et plusieurs de ses collègues

La présente proposition n’a pas été examinée par l’Assemblée et n’engage que ses signataires

1. Les travailleurs turcs migrants représentent une proportion importante de la population immigrée de certains Etats Membres du Conseil de l’Europe. La première période de l’émigration turque remonte au début des années soixante et répondait aux besoins de l’économie de l’Allemagne de l’Ouest (RFA). Souffrant d’un déficit de main-d’œuvre, la RFA signait en octobre 1961 un accord bilatéral avec la Turquie portant sur l’organisation de l’émigration pour une courte durée des travailleurs turcs. Comme le terme de ‘Gastarbeiter’ (travailleur hôte) l’indique, les migrants turcs pensaient rester à court terme sur le sol allemand avant de retourner vers leur pays d’origine. Pourtant, d’une immigration pensée temporaire, on est rapidement passé dès 1967 à une immigration de peuplement. Outre la RFA, d’autres pays européens ont signé des conventions bilatérales avec la Turquie (Belgique, Pays-Bas, Autriche, France, Suède, Suisse) et au fil du temps, les travailleurs immigrés turcs sont devenus une partie intégrante de la société de nombreux pays européens. 2. A la fin de 1999, selon les sources du ministère de travail turc, 3 038 215 ressortissants de Turquie résidaient dans les pays de l’UE dont un million d’actifs ayant un emploi ou à la recherche d’emploi. Quant à leur répartition, on en dénombrait plus de 730 000 en Allemagne, 76 000 en France, 57 000 en Autriche, 51 00 aux Pays-Bas et 44 000 au Royaume-Uni. 3. L’Assemblée souhaite se pencher sur la situation des travailleurs migrants turcs vivant dans les Etats Membres du Conseil de l’Europe étant donné leur nombre important et la longue durée de leur séjour sur le sol européen. L’enjeu est important car il est à la fois économique, social et culturel. Il est nécessaire de clarifier certains aspects fondamentaux de leur statut juridique : d’une part le problème de l’intégration de ces travailleurs migrants au sein de leur société d’accueil et celui de leur possible réintégration au pays d’origine en cas de retour, particulièrement en matière d’accès aux droits sociaux (transfert de pensions, assurance maladie), d’autre part l’absence de modalités leur permettant d’accéder à un emploi au sein d’un pays autre que leur pays d’accueil. 4. La situation des travailleurs migrants turcs dans l’Union Européenne (UE) est basée sur un accord d’association signé en 1963 entre l’UE et la Turquie qui définit les droits de ces immigrés en matière d’emploi, de protection sociale et de libre circulation. Si une politique encore plus cohérente était mise clairement en place au niveau du Conseil de l’Europe, ceci permettrait aux travailleurs turcs de bénéficier d’un traitement de niveau comparable aux travailleurs nationaux. 5. L’Assemblée rappelle qu’elle a toujours porté une attention particulière à la situation des travailleurs migrants en Europe par l’adoption de nombreuses recommandations : la Recommandation 36 (1949) relative aux travailleurs migrants, la Recommandation 712 (1973), la Directive n° 338 (1973) et la Résolution 551 (1973) relatives à l’intégration des travailleurs migrants dans la société des pays d’accueil, la Recommandation 879 (1979) relative à la circulation des personnes entre les Etats membres du Conseil de l’Europe, la Recommandation 968 (1983) et la Directive n° 420 (1983) relatives aux attitudes et mouvements xénophobes dans les pays membres à l’égard des travailleurs migrants, la Recommandation 1007 (1985) relative au retour des travailleurs migrants dans leur pays d’origine, la Recommandation 1066 (1987) relative à la protection sociale des travailleurs migrants et de leurs familles et la Recommandation 1082 (1988) relative au droit de résidence permanente des travailleurs migrants et des membres de leurs familles, la Recommandation 1587 (2002) relative au séjour, statut juridique et liberté de circulation des travailleurs migrants en Europe : les enseignements du cas du Portugal (1587). 6. D’autres instruments adoptés par le Conseil de l’Europe traitent du thème des droits des travailleurs migrants : la Résolution 557 (1973) relative à la responsabilité des Etats membres du Conseil de l’Europe, en ce qui concerne la libre circulation des personnes en Europe et la Convention Européenne d’Etablissement (1955), le Code Européen de Sécurité Sociale (révisé) (1990) ou encore plus généralement la Charte Sociale Européenne (1961). Enfin, la Convention Européenne relative au Statut Juridique du Travailleur Migrant (1977) ainsi que la Convention Européenne de Sécurité Sociale (1977) constituent très certainement des instruments majeurs dans la présente analyse de la situation des travailleurs migrants turcs en Europe. 7. L’Assemblée est d’avis qu’il est important de vérifier l’application de ces divers instruments par les Etats membres, en particulier en ce qui concerne la population immigrée la plus large d’Europe. 8. Pour ces raisons, l’Assemblée invite le Comité des Ministres à : i. demander à ses organes compétents d’étudier la situation des travailleurs migrants turcs en Europe quant aux aspects concernant leur insertion sociale, les droits liés à la retraite et droits sociaux plus généralement et enfin leur possible accès à la libre circulation en matière d’emploi ii. encourager les pays membres à signer et ratifier la Convention Européenne sur le statut juridique des travailleurs migrants et la Convention Européenne de sécurité sociale si tel n’est pas encore le cas ; iii. inviter les pays membres à assurer que les droits de pension soient transférables quel que soit le pays de destination des travailleurs turcs migrants et fournir une information adéquate quant à leurs droits d’accès aux logementó sociaux, à la protection sociale, la pension et les services de santé.

Signé[1] : GÜLÇIÇEK, Ali Riza, Turquie, SOC ALIYEV, Bakhtiyar, Azerbaïdjan, SOC ÇAVUSOGLU, Mevlüt, Turquie, GDE CILEVICS, Boriss, Lettonie, SOC DANIELI, Franco, Italie, LDR EINARSSON, Mats, Suède, GUE ILASCU, Ilie, Roumanie, NI JUDD, Royaume-Uni, SOC LE GUEN, Jean-Marie, France, SOC STOISITS, Terezija, Autriche, SOC TEKELIOGLU, Mehmet, Turquie, PPE/DC TKÁC, Vojtech, Slovaquie, GDE van THIJN, Ed, Pays-Bas, SOC

[1] SOC Groupe socialiste PPE Groupe du Parti populaire européen GDE Groupe des démocrates européens LDR Groupe libéral, démocrate et réformateur GUE Groupe pour la gauche unitaire européenne NI Non inscrit dans un groupe

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