Le temps interrompu. (notice bibliographique)

NATHAN Tobie : Docteur en Psychologie, psychothérapeute, est professeur de psychologie clinique et pathologique à l’université de Paris VIII, où il dirige le Centre Georges Devereux, spécialisé dans l’aide psychologique aux familles migrantes.

Les mouvements de populations sont de tous les lieux et de tous les temps. Cependant, depuis la dernière guerre, la situation géopolitique a considérablement amplifié les phénomènes d’extermination, de déplacement ou d’acculturation violente de peuples entiers.

L’exil est évidemment une perte et l’on ne sait pas ce que l’on a perdu : certes des personnes, des objets, des lieux, des odeurs, des couleurs mais surtout la grammaire pour nommer cette perte. Comme une langue, cette grammaire a besoin de s’étayer quotidiennement sur l’environnement. Privée de son support réel, le système s’étiole peu à peu, s’appauvrit, se rétracte, se rigidifie conduisant le sujet quelquefois trente ans après le départ à des pathologies spécifiques : névroses traumatiques, psychoses puerpérales, bouffées délirantes, etc…

Pris dans une tentative permanente de déni de la modification de l’environnement culturel, les migrants qui réussissent à éviter la pathologie construisent des personnalités souvent riches mais clivées. Quelquefois, pour certains, les breaks psychotiques ne surviennent qu’à la génération suivante.

L’exploitation de cette clinique spécifique nous conduit à envisager de manière nouvelle la fine homéostasie réglant les rapports de l’espace interne (psychique) et de l’espace externe (culturel). Ce numéro, issu de la clinique, invite à un questionnement nouveau de la métapsychologie psychanalytique.

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