Les maladies mentales de l’enfance à l’âge adulte par Eric Gallois*

*CPOA, CH Sainte-Anne, 75014 Paris

En préambule à l’ouverture du 16ème congrès annuel du Collège Européen de Neuropsychopharmacologie (ECPN) qui s’est déroulé cette année à Prague, le laboratoire Janssen-Cilag a organisé un symposium-presse sur les objectifs futurs et les enjeux des traitements des maladies mentales au 21ème siècle. Les récentes données des « Stratégies thérapeutiques pour la vie (Strategies for living) » concernent la rispéridone dans le traitement des états maniaques et de la schizophrénie, et les avancées dans le traitement du trouble du déficit de l’attention/hyperactivité. Ce symposium-presse a réuni des psychiatres de divers pays, des patients et des familles de patients, des journalistes spécialisés de revues médicales et scientifiques, ainsi que des journalistes de la presse d’information à caractère socio-familial.

Après un bref rappel historique sur les premières prises en charge des malades mentaux, le professeur Prakash Masand (Duke University Medical Centre, Durham, Caroline du Nord, USA) a insisté sur la persistance des situations affectives et sociales d’exclusion, de discrimination, dont continuent à souffrir les malades mentaux. Il a tenté de définir les principaux problèmes concernant les soins des maladies mentales chroniques : une meilleure connaissance biologique des maladies, la précocité du diagnostic, l’observance, l’adhésion et la continuité des traitements au long cours. Parmi plusieurs exemples, il a cité le cas de la schizophrénie (1) avec un taux d’adhésion au traitement, après un an, particulièrement faible, du trouble bipolaire avec, environ, 50% de cas sans observance après un an de traitement par du lithium (2), ou de traitement par la carbamazépine ou le divalproex (3). Enfin, il a souligné les répercussions sociales et économiques des ruptures de traitement.

Le docteur Pierre Chue (Clinical Associate Professor, Département de psychiatrie, Université d’Alberta, Edmonton, Canada) a rappelé l’incidence considérable des maladies mentales à l’échelle planétaire sur la santé publique. Les résultats du rapport OMS 2001 (4) estiment que 450 millions de personnes, soit environ 10% de la population mondiale, sont atteintes d’une maladie mentale. Durant sa vie, 1 personne sur 4 présentera une des 4 affections psychiatriques suivantes : hyperactivité (TDHA), dépression, trouble bipolaire, schizophrénie. La dépression affecte 121 millions de personnes, principalement entre 15 et 44 ans. Les troubles bipolaires (6) touchent 14,1 millions de personnes, 1 patient sur 3 seulement est traité. Les troubles schizophréniques affectent 24 millions de personnes, 1 personne sur 100 développera cette affection avant 45 ans (7).

L’incidence du TDHA est évalué entre 4% à 19% (5) en fonction des critères de diagnostic utilisés et de la situation géographique, parmi les enfants en âge scolaire. Enfin, il a rappelé que la trame commune à toutes ces affections qu’elle soient chronique ou aiguë, sévère ou légère, est une perte plus ou moins importante de la capacité de relation avec l’environnement.

Le Professeur Jan Buitelaar (Department of Child Psychiatry, University Medical Centre, Nijmegen, Netherlands) a évoqué le TDHA, affection caractérisée par une incapacité persistante à se concentrer et à fixer son attention, et/ou par une hyperactivité chronique et une impulsivité incontrôlée. Elle est souvent mal connue et sous-diagnostiquée. Les récentes données mettent en évidence des anomalies morphologiques et structurelles du cerveau (8, 9) visualisées par des dispositifs d’imagerie poussés, responsables d’un déficit de 2 types de neurotransmetteurs : la dopamine et la noradrénaline. Les répercussions sociales, familiales, cognitives et affectives à court, moyen et long terme sont très importantes. Le traitement des enfants atteints du TDAH repose sur une bi-thérapie, pharmacologique et comportementale (10). Les stimulants (notamment le méthylphénidate) sont les médicaments actuellement les plus efficaces (70% de réponses positives) et les plus utilisés. L’observance du traitement, qui nécessite 3 prises quotidiennes sur des périodes très longues, constitue la principale difficulté de la prise en charge. Un dispositif galénique original de libération prolongée et régulière du principe actif sous forme de chlorhydrate de méthylphénidate (CONCERTA LP dosé à 18, 36 ou 54 mg), permet une administration journalière unique du méthylphénidate, et une amélioration sensible de l’observance, confirmée par plusieurs études contrôlées (11).

Le professeur Allan Young (Departement de Psychiatrie, Royal Victoria Infirmary, Newcastle Upon Tyne, Royaume-Uni) a présenté les dernières données (Sachs et al, non publiées) d’une étude sur la rispéridone, traitement adjuvant de première intention des symptômes de manie aiguë des sujets atteints de trouble bipolaire. La rispéridone induit une plus forte amélioration des symptômes et moins d’effets indésirables qu’un stabilisateur de l’humeur prescrit seul, ou que l’association d’un thymorégulateur et d’un neuroleptique classique (halopéridol). Elle améliore les symptômes de dépression qui peuvent apparaître lors du traitement de l’épisode maniaque. Les recherches récentes montrent que la rispéridone est efficace en monothérapie, grâce à une action plus rapide et à sa meilleure tolérance. La posologie initiale est de 2 mg par jour et la dose maximale suggérée est de 6 mg par jour en une prise. Actuellement, 15 pays autorisent la rispéridone comme traitement adjuvant de la manie bipolaire.

Le professeur Robin Emsley (Département de psychiatrie à l’Université de Stellenbosch, Afrique du Sud) a souligné le défi que représente la prévention des rechutes des patients schizophrènes. Il a communiqué les derniers résultats de l’étude « Futuris » portant sur 535 patients atteints de schizophrénie, traités par halopéridol et rispéridone pendant 1 à 5 ans. Sur, approximativement, trois quarts des patients qui ont présenté une rémission, 21% de ceux traités par rispéridone rechutaient ultérieurement, contre 54,7% de ceux traités par halopéridol. Enfin, les patients traités par rispéridone restaient indemnes de toute rechute 2 fois plus longtemps que ceux par halopéridol (respectivement 15 mois et 7 mois) et les symptômes extrapyramidaux étaient moins fréquents dans 20 à 38% des cas.

Poursuivant sur le thème de l’adhésion et de l’observance au traitement des patients schizophrènes, le professeur Tom Burns (département de psychiatrie, Warneford Hospital, Oxford, Royaume-Uni) a présenté le Risperdal Consta, premier antipsychotique « atypique » disponible sous forme injectable, et d’action prolongée. Il a rappelé les précédentes études et les premiers résultats de l’étude pan-européenne « StoRMi » (Switch to risperidone Microsphere). La risperidone est encapsulée dans de petites sphères de polymère biodégradable qui se dégradent progressivement à vitesse contrôlée dans l’organisme. L’étude « Stormi » montre (12) que :

a) les symptômes positifs et négatifs, leur sévérité et la réponse au traitement, se sont significativement améliorés au cours des 6 mois de l’étude, après des mesures effectuées au moyen de 3 échelles différentes validées ;

b) le passage à Risperdal Consta ne nécessite aucune période de transition sous rispéridone orale ; par contre les patients peuvent continuer à prendre leur précédent traitement antipsychotique, pendant les 3 premières semaines après le début des injections ; c) les effets secondaires sont légers ou modérés chez 85% des patients.

Au terme de cette journée riche en information, chaque participant a été invité à tester le simulateur « paved with fear » (« Peur à tous les étages ») mis au point par Janssen Pharmaceutica. Le participant, enfermé dans une cabine spécialement aménagée, est soumis, grâce à une série de clips vidéo, bruits, voix, musiques et mouvements déformés et intenses, au vécu inquiétant des hallucinations auditives et visuelles de persécution des patients schizophrènes.

Bibliographie

(1) Coldham EL et al, Acta Psychiatr Scand 2002.

(2) Danion JM et al., Pharmacopsychiatry 1987.

(3) Keck PE et al., Psychopharmacol Bull 1997.

(4) Taylor E et al., Clinical guideless for hyperkinetic disorder, European Child and Adolescent Psychiatry.

(6) International Society for Bipolar Disorder www.isbd.org.

(7) Rapport OMS 2001 web site. www. who.int

(8) Castaliance et al., JAMA 2002, 285-1740.

(9) Bush et al., Biol.Psychiatry 1999.

(10) MTA Cooperative Study Group, Arch Gen Psychiatry 1999, 56-1073.

(11) Swanson et al., Arch Gen Psychiatry 2003, 60, 6.

(12) Moeller HJ, Schmaub M, Kissling W, Riedel M, Naber DH., Switch to Long-acting Risperdone Microspheres- Results of a prospective Trial, ECPN, Prague, 20 à 24.09.03.

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