Marie Rose Moro« Les enfants de l’exil »

Horizon 43, Pages 6 et 7

« Les enfants de l’exil », une nouvelle étude commandée par l’Unicef France et la Sonacotra.

Après « Le devenir des enfants d’immigrés demeurés au pays d’origine » en juin 2001, l’Unicef France et la Sonacotra se sont à nouveau associées pour commander une étude portant sur l’adaptation et l’évolution des familles de demandeurs d’asile pendant leur séjour en centre d’accueil. Evaluant les problématiques spécifiques des enfants et des parents, deux équipes de chercheurs se sont rendues dans des établissements Sonacotra. Marie Rose Moro, Professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à l’Université de Paris XIII et Jacques Barou, sociologue et chercheur au CNRS, ont dirigé les équipes composées de psychiatres, psychologues, sociologues, anthropologues et ethnologues. Marie-Rose Moro répond aux questions d’Horizon sur cette nouvelle étude, aujourd’hui disponible.

1) Quelles sont les principales difficultés auxquelles doivent faire face les demandeurs d’asile en arrivant dans les établissements de la Sonacotra ?

Les demandeurs d’asile doivent tout réinventer. Contrairement aux migrants traditionnels qui, en arrivant dans le pays d’accueil, conservent une organisation sociale et familiale, même rétrécie, les demandeurs d’asile sont privés de liens communautaire, social et même familial, après avoir été souvent séparés des leurs. Organiser la vie de tous les jours dans un contexte culturel très différent, en méconnaissant la langue, peut leur paraître insurmontable. Pourtant, l’organisation de cette réalité quotidienne est un enjeu capital pour leur fonctionnement psychique. Cette réussite aidera les parents à se maintenir debout quand, après avoir vécu les événements avec courage, ils menacent parfois de s’effondrer une fois arrivés dans les CADA (Centres d’Accueil de Demandeurs d’Asile) ou les AUDA (Accueil d’Urgence de Demandeurs d’Asile). C’est en effet à ce moment-là qu’ils doivent passer d’une organisation de survie à un nouveau rythme de vie. Cette gestion du quotidien est une des principales difficultés qu’ils rencontrent, avec bien sûr l’attente et l’incertitude quant à l’aboutissement de leur demande d’asile.

2) Mais les intervenants sociaux sont à leurs côtés pour les aider et les soulager ?

Les intervenants sociaux jouent un rôle fondamental, ils accompagnent les familles dans leurs démarches, les écoutent, les aident à se défendre. Ils ont une fonction de protection, à condition qu’on leur donne les outils pour faire face, car les situations sont tellement émouvantes, difficiles et complexes, qu’ils peuvent se sentir démunis parfois. Les gens qui font ce travail sont très motivés pour le faire, ils ont su développer leurs capacités d’empathie et sont souvent dotés d’une bonne intuition, mais il est important de mettre en place des lieux de paroles pour qu’ils puissent parler des problèmes qu’ils rencontrent, et trouver la bonne position par rapport aux familles, ainsi que des outils transculturels afin de mieux comprendre les différences de chacun, et savoir comment on ressent les choses dans une autre culture, comment on les exprime, ou pourquoi on les tait. Une formation anthropologique et psychologique est nécessaire.

Pour l’article complet : Site de sonacotra

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