Noam CHOMSKY : Dialogues avec Mitsou Ronat

Flammarion, 1977

Il y a deux Noam Chomsky. L’un est un citoyen des Etats-Unis, qui s’est opposé avec éclat à la guerre du Vietnam, dénonce sans trêve l’impérialisme américain et joue les trouble-fête du « libéralisme totalitaire ». Il parle ici, avec vigueur, du rôle de l’intelligentsia dans le contrôle de l’opinion, démonte quelques opérations quotidiennement menées par le F.B.I., analyse le recul de la contestation étudiante, et détruit au passage le mythe de la complexité du politique, réservé aux seuls « spécialistes ».

L’autre Chomsky est linguiste. Spécialiste donc, auteur de théories nécessairement complexes – mais ennemi de tout ésotérisme gratuit. Il explique clairement sa conception des rapports entre l’étude du langage et la psychologie, la sociologie, la philosophie. Et retrace le chemin qui l’a conduit à inventer la « grammaire générative » en réponse, principalement, à deux exigences. D’abord, rendre compte de l’acquisition du langage moins naïvement que l’empirisme, en postulant des structures d’acquisition innées, biologiquement déterminées, et non un cerveau humain comparable à une cire vierge. Ensuite, comprendre comment les phrases sont produites. Comment, par exemple, un sujet parlant sait-il aussitôt, « sans réfléchir », que telle phrase est « possible » dans sa langue et telle autre non ? Chomsky expose, avec rigueur, les principes, l’évolution et les résultats essentiels de sa recherche jusqu’à aujourd’hui.

Une introduction, donc. Mais pas seulement. Sur ce qui l’oppose au structuralisme, et sur les relations du sens et de la grammaire, c’est la première fois que le linguiste s’exprime aussi explicitement. En fait, chacun de ces deux Chomsky s’adresse à deux lecteurs, le simple citoyen et le spécialiste.

Aller au contenu principal