Benoît Dalle : Ancien psychiatre des Hôpitaux, ancien chef de clinique-assistant 48, rue Monsieur-le-Prince,, 75006 Paris France
Marc Weill : Praticien hospitalier, ancien interne des hôpitaux de Paris service du docteur Massé, centre hospitalier spécialisé Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75674
L’articulation entre psychanalyse et psychiatrie a longtemps alimenté, malgré les frictions inévitables qui en ont résulté, une réflexion théorique d’une extrême richesse parallèlement à la construction d’une nosographie cohérente. L’ouverture de la notion de démence précoce (DP) vers celle du groupe des schizophrénies de Bleuler est, de ce point de vue, paradigmatique. Les élaborations théoriques et thérapeutiques suscitées par cette confrontation tout au long de ce siècle, depuis les travaux princeps de Freud jusqu’à la conception psychanalytique moderne de la schizophrénie, n’ont cessé de tenter de répondre aux questions posées par l’étiogenèse, la structure du processus psychotique et celle du sujet souffrant. Plus pragmatiquement, c’est aussi la question de la thérapeutique qui s’est imposée comme centrale. Le modèle duel dérivé de la prise en charge des patients névrosés a ainsi su s’enrichir des développements de Jung, Ferenczi, Abraham, Klein, Bion ou Lacan, mais aussi de Ey ou Minkowski ainsi que des expériences de thérapie institutionnelle, pour évoluer vers une prise en charge plus globale de l’individu nécessaire à l’appréhension d’une pathologie aussi polymorphe qu’aliénante. L’apparition d’une réflexion plus biopsychosociale, l’appréhension transconceptuelle des psychoses et le développement des neurosciences qui marque les 15 dernières années doivent-ils pour autant reléguer la psychanalyse à une simple place de grille de lecture clinique ou de rang de page, tournée, de l’histoire du traitement des malades mentaux ? Nous ne le pensons pas. La théorie psychanalytique décrit schématiquement deux périodes évolutives de la schizophrénie. Une première phase régressive, apparentée aux observations de Klein sur la période shizoparanoïde, serait justiciable d’une prise en charge hospitalière, maternante, groupale, parfois longue, incluant une approche familiale autant qu’individuelle et réalisant un cadre thérapeutique pluriel. L’autre, permise par les ouvertures évolutives créées lors de la précédente, relèverait alors d’un cadre plus classiquement duel mais toujours référé sur un extérieur, le plus souvent institutionnel, afin de pallier les éventuelles carences mutuelles du patient et de son analyste