PSYCOM75 : « Anxiété et phobies »

Guide édité par Psycom75, 2006.

www.psycom75.org

Le Psycom75 est un syndicat interhospitalier qui regroupe les quatre établissements publics de santé mentale de Paris (Esquirol, Maison-Blanche, Perray-Vaucluse, Sainte-Anne) et l’Association de santé mentale du 13ème arrondissement (A. S. M. 13).

Ce guide des psychothérapies est destiné aux patients et à leur famille, auxmédecins généralistes et spécialistes, aux psychologues, soignants, travailleurs et associations.

- QUELQUES DÉFINITIONS

L’anxiété est un état mental de trouble et d’agitation, un état affectif pouvant se définir comme un sentiment d’insécurité indéfinissable, une peur sans objet.

L’angoisse englobe l’anxiété et ses manifestations somatiques d’oppression et de constriction. Il s’agit d’un même phénomène avec une intensité croissante : inquiétude, anxiété, angoisse.

La peur est un état anxieux qui accompagne la prise de conscience d’un danger ou d’une menace objectifs, réels, perçus par chacun.

La phobie est une peur irrationnelle spécifique, déclenchée par un objet ou une situation n’ayant pas en eux-mêmes de caractère dangereux. La peur disparaît en dehors de l’objet ou de la situation phobogène. Le danger, la menace sont imaginaires. Elles sont liées à la personnalité et l’histoire de la personne.

Le stress est une réaction d’adaptation, non spécifique, de l’organisme à une agression physique, psychologique ou sociale et s’accompagne d’un état anxieux.

La classification des troubles psychiques

Il existe plusieurs façons de décrire les troubles psychiques, correspondant à différents courants de l’histoire de la psychiatrie. A l’heure actuelle, deux classifications internationales des diagnostics psychiatriques sont principalement utilisées par les psychiatres :
- la Classification internationale des maladies de l’ Organisation Mondiale de la santé, dixième version (CIM10),
- le Diagnostic Statistical Manual, quatrième version (DSM-IV), développé par l’Association américaine de psychiatrie.

Ces deux classifications internationales, assez identiques, proposent une description clinique de syndromes (ensemble de symptômes). Elles ne tiennent pas compte de l’origine des symptômes, ni de la personnalité qui les accompagne.

Pour les troubles anxieux, les principaux syndromes décrits dans ces classifications sont les suivants : attaque de panique, trouble panique, trouble anxieux généralisé, troubles phobiques, trouble obsessionnel compulsif et état de stress post-traumatique.

- LE TROUBLE ANXIEUX GÉNÉRALISÉ (TAG)

Dans les pays occidentaux, le taux de prévalence du TAG au cours de l’année, en population générale, est estimé à 4%, les femmes étant 2 fois plus touchées que les hommes. Il existe quelquefois une prédisposition génétique au TAG, souvent partagée avec la dépression majeure. Le TAG est également associé aux événements de vie tels que le divorce ou la perte d’emploi.

Selon le DSM-IV, le TAG est un état d’anxiété permanente/de soucis excessifs, durant au moins 6 mois. Cette anxiété n’est pas liée à un objet ou à une situation précise ; c’est une inquiétude excessive de tous les moments de la vie quotidienne (vie professionnelle, familiale, affective, sociale). La personne éprouve des difficultés à contrôler cette inquiétude et une détresse importante.

L’anxiété et les soucis peuvent être associés à plusieurs des symptômes physiques suivants :
1 – tension motrice : fatigue, tension musculaire, agitation ou surexcitation ;
2 – hypervigilance : difficultés de concentration, troubles du sommeil, irritabilité ;
3 – troubles associés : mains froides et humides, bouche sèche, sueurs, nausées ou diarrhée, besoin d’uriner fréquent, difficultés à avaler ou sensation de boule dans la gorge, tremblements, contractions, douleurs, endolorissement musculaire, syndrome du côlon irritable, céphalées.

Cette anxiété généralisée a un fort retentissement sur la vie de la personne. Elle s’accompagne souvent d’un état dépressif.

- L’ATTAQUE DE PANIQUE

Il s’agit de la survenue brutale d’une peur intense, d’un sentiment de mort ou de catastrophe imminente, de perte de contrôle de soi. Cette peur intense apparaît dans des circonstances n’impliquant pas un risque vital pour la personne.

Ce sentiment s’accompagne de signes physiques et comportementaux :
- palpitations, battements de coeur ou accélération du rythme cardiaque, transpiration, tremblements ou secousses musculaires,
- sensations de « souffle coupé » ou impression d’étouffement, sensation d’étranglement, douleur ou gêne thoracique, nausée ou gêne abdominale,
- sensation de vertige, d’instabilité, de tête vide ou impression d’évanouissement
- déréalisation (sentiments d’irréalité) ou dépersonnalisation (être détaché de soi),
- peur de perdre le contrôle de soi ou de devenir fou, peur de mourir,
- sensations d’engourdissement ou de picotements, frissons ou bouffées de chaleur.

Une attaque de panique dure environ 3o minutes. L’évolution de l’attaque de panique dépend de la cause et du contexte.

Ces crises peuvent être spontanées, réactionnelles à un traumatisme ou une prise de toxiques, accompagner une maladie organique en particulier aiguë, ou encore survenir dans un état psychopathologique particulier (dépression, psychose, démence).

- LE TROUBLE PANIQUE

C’est la répétition d’attaques de panique, de survenue spontanée, inattendue. Elle s’accompagne de la peur d’avoir peur.

Le trouble panique survient entre 20 et 3o ans, plus souvent chez la femme. Son évolution est chronique avec des phases de rémission et des phases d’aggravation. Il peut se compliquer de phobies (agoraphobie), de dépression, d’abus de psychotropes et d’alcool. Le retentissement sur la vie sociale et professionnelle peut être important.

- LES PHOBIES

La phobie est une peur irraisonnée, intense et spécifique à un objet ou une situation. Les phobies sont très fréquentes dans la vie psychique normale. Elles deviennent pathologiques par leur intensité et leur retentissement sur la vie de la personne.

Les phobies s’accompagnent soit de conduites d’évitement de l’objet ou de la situation, soit de conduites qui rassurent (conduites contraphobiques). La personne a conscience du caractère absurde de sa peur.

Les phobies spécifiques

Elles sont très variées. Elles se définissent par la peur irraisonnée et intense d’animaux (souris, araignée), d’objets (couteaux, ciseaux, plume, sang), des hauteurs (vide), des transports (avion, train, auto), des lieux clos (claustrophobie), peur de l’eau, du noir etc…

L’agoraphobie

C’est une peur irraisonnée et intense des espaces découverts et de la foule, ou de toute situation dont on ne peut s’échapper facilement (être seul loin de son domicile, être sur un pont…). Ces situation sont vécues avec une grande souffrance ou sont évitées. Comme pour les autres troubles anxieux, le retentissement sur la vie quotidienne peut être important.

Les phobies sociales

C’est la peur irraisonnée et intense des situations où l’on est exposé au regard d’autrui. Par exemple : peur de rougir, peur de trembler, de parler, de paraître, de manger ou de vomir en public, peur des examens, etc…

La dysmorphophobie

La dysmorphophobie est une préoccupation concernant un défaut imaginaire de l’apparence physique. Si un défaut physique est apparent, la préoccupation est manifestement démesurée. Les gens qui en souffrent peuvent passer un temps considérable à examiner leur « défaut » ou à se livrer à des soins. Ils tentent ainsi de diminuer leur anxiété mais l’effet est souvent inverse, ce qui amène parfois à essayer d’éviter de se voir en enlevant tous les miroirs par exemple.

- LE TROUBLE OBSESSIONNEL COMPULSIF (TOC)

Les données américaines et anglaises récentes montrent que le trouble obsessionnel compulsif (TOC) toucherait environ 2 % de la population adulte. Le TOC serait ainsi la zj e pathologie psychiatrique la plus fréquente après les troubles phobiques, les troubles liés aux toxiques (alcool et drogue) et les troubles dépressifs. Le début du trouble est précoce, son évolution est chronique dans la plupart des cas.

Il s’accompagne souvent de peurs particulières qui envahissent la pensée en permanence et deviennent des craintes obsédantes. Ces craintes ont souvent un contenu agressif, pour soi ou pour autrui ; la personne lutte anxieusement pour les neutraliser.

Les obsessions idéatives

La conscience de la personne est envahie par une idée ou une pensée de façon permanente, incontrôlable, qui l’assiège et l’épuise dans une lutte anxieuse pour la neutraliser. Ce sont des idées concrètes (mots, chiffres, objets, personnes), ou des idées plus abstraites (référence à la morale, la métaphysique, la vie, la mort, la religion, l’ordre, la sexualité), ou encore des idées se rapportant aux comportements. La personne est en proie aux doutes, ruminations, scrupules. Ces idées s’accompagnent de compulsions ou de rituels.

Les obsessions phobiques

Ces obsessions se rapprochent des phobies (cf. plus haut), mais elles sont différentes car elles apparaissent en dehors d’une situation phobogène. Ce n’est pas la situation qui provoque l’anxiété mais la pensée de celle-ci. Ce sont en particulier :
- les phobies des maladies, du cancer,
- les phobies des microbes et de la saleté,
- les phobies d’impulsion (crainte de commettre un acte absurde, immoral, d’agresser quelqu’un ou soi-même). Cela reste le plus souvent au niveau de la pensée, de l’intention, les passages à l’acte sont exceptionnels.

Les compulsions

Ce sont des actes qui s’imposent à la personne de façon permanente, incontrôlable, obligatoire et répétitive. Ils ont un caractère magique et conjuratoire, absurde. Ils accompagnent souvent les obsessions et les compliquent : compulsion à compter, suites de mots, rituels de vérification, de lavage, de la toilette, de l’habillage et du déshabillage, du coucher etc. Souvent l’entourage doit y participer pour garantir leur exécution et leur efficacité.

- LE DIAGNOSTIC DES TROUBLES ANXIEUX

Avant de poser le diagnostic de trouble panique, il faut éliminer une maladie somatique, en particulier aiguë. Mais il faut aussi identifier l’état anxieux devant une symptomatologie somatique.

On distingue aussi anxiété et dépression, même si ces deux états cohabitent souvent.

La dépression est un trouble de l’humeur (tristesse, inhibition, repli, dévalorisation, idées de suicide), qui s’accompagne souvent d’anxiété. De même, les états anxieux et phobiques peuvent se compliquer de dépression, mais aussi d’abus de psychotropes et d’alcool (souvent utilisés afin de lutter contre l’anxiété).

Enfin, certains états anxieux et phobiques sont également présent chez des personnes souffrant de psychose délirante, schizophrénique ou non.

- COMMENT TRAITER LES TROUBLES ANXIEUX ?

¤ Hygiène de vie

Des mesures hygiéno-diététiques comportant l’arrêt de l’alcool et du tabac, la diminution de la consommation de café, la pratique régulière d’une activité physique (marche, course, natation ou cyclisme) sont recommandées dans l’amélioration des troubles anxieux.

¤ La relaxation

Elle permet d’améliorer le contrôle émotionnel, de se déconnecter de son environnement et se concentrer sur soi, et d’éviter l’accumulation des tensions musculaires et psychologiques. Pour se relaxer il faut s’entraîner à se concentrer en étant détendu musculairement. La relaxation peut être associée à une thérapie comportementale.

¤ Les psychothérapies

Une psychothérapie est un traitement dont le but est le soin et/ ou la guérison par des moyens psychologiques. Elle s’effectue par des entretiens réguliers avec un psychothérapeute, individuels ou en groupe. La durée du traitement varie de quelques mois à quelques années. Elle peut être pratiquée seule ou associée à d’autres thérapeutiques (ex : prescription de médicaments).

Tous les problèmes de type anxieux peuvent en bénéficier, quelle que soit la souffrance psychique exprimée. Il existe différentes formes de psychothérapies qui peuvent bénéficier aux anxieux.

Les thérapies comportementales et cognitives (TCC)

C’est une thérapie brève, validée scientifiquement, qui vise à remplacer les idées négatives et les comportements inadaptés par des pensées et des réactions en adéquation avec la réalité.

Elle aide à dépasser progressivement les symptômes invalidants (rites, vérifications, stress, évitements, inhibitions, réactions agressives) ou la détresse à l’origine de la souffrance psychique. Elle se pratique sur une base de io à 25 séances, individuelles ou de groupe, de 3o à 45 minutes. En cas d’anxiété associée à un trouble de la personnalité, la thérapie cognitive ou la psychothérapie analytique sont conseillées, en fonction des attentes du patient.

La psychanalyse

Elle a pour but de faire revenir au niveau conscient des souvenirs refoulés, afin d’expliciter les conflits inconscients à l’origine des troubles. Elle est adaptée aux personnes trop anxieuses, si celles-ci sont prêtes à accepter un long travail personnel pour chercher les causes profondes de leur anxiété et le sens de leurs comportements.

Une psychanalyse dure plusieurs années, à raison de plusieurs séances de 3o à 45 minutes par semaine.

La psychothérapie psychanalytique

Elle a pour but de favoriser la diminution ou la disparition des symptômes et l’apparition d’une meilleure adaptation. Elle permet de clarifier les conflits internes et de renforer les mécanismes de défense de la personne. Le thérapeute intervient plus souvent que dans la cure psychanalytique ; au cours d’entretiens en face à face.

La psychothérapie peut être brève (3 à 6 mois), en réponse à des problèmes réactionnels, ou plus longues (2 ou 3 ans), pour retrouver confiance en soi et renforcer les capacités de la personne.

La psychothérapie de groupe

L’action thérapeutique naît des relations psychologiques entre les participants du groupe. Le but est de favoriser l’expression des sentiments et des émotions pour augmenter la liberté de la personne. La thérapie de groupe permet aux participants, au fil des séances, de comprendre leurs modes de relation aux autres, d’améliorer leur confiance en soi, d’apprendre à s’intégrer à des groupes et à vivre socialement. Il existe plusieurs méthodes (psychodrame, groupes de paroles…). La thérapie dure 1 ou 2 ans, à raison de séances hebdomadaires de 1 à 2 heures.

¤ Les traitements médicamenteux (psychotropes)

Pour les différents troubles anxieux évoqués dans cette brochure, les médicaments peuvent, associés à une psychothérapie, pour apporter un véritable complément.

Pour les attaques de panique, on peut utiliser des benzodiazépines (anxiolytiques) et des antidépresseurs, en particulier les inhibiteurs du recaptage de la sérotonine, spécifiques (ISRS type Paroxétine, Fluvoxamine) ou non (type Imipramine et Chlorimipramine), au long cours et à doses faibles ou modérées.

Pour l’anxiété généralisée, seules les benzodiazépines, la Buspirone, et un antidépresseur, la Venlafaxine LP, ont reçu l’autorisation de mise sur le marché (AMM). Elles induisent un risque de somnolence dès le début du traitement et de dépendance à l’arrêt. Le sevrage progressif des benzodiazépines, quelle que soit leur demi vie, est recommandé, même après un traitement de courte durée.

Prescription des hypnotiques et anxiolytiques

La prescription des hypnotiques et des anxiolytiques doit reposer sur une analyse soigneuse de la situation clinique, en cherchant à séparer ce qui relève des difficultés transitoires et des réactions à une pathologie somatique, de la pathologie psychiatrique confirmée. Elle doit être régulièrement réévaluée et tenir compte des indications de l’AMM, de la fiche de transparence et de l’arrêté du 7 Octobre 1991. Un traitement datant de plusieurs semaines ne doit pas être arrêté brutalement.

Dans le cadre de cette prescription :
1. Il n’y a pas lieu, dans le traitement de l’anxiété, d’associer deux anxiolytiques (benzodiazépine ou autre).
2. Il n’y a pas lieu d’associer deux hypnotiques.
3. Il n’y a pas lieu de prescrire des anxiolytiques et/ou des hypnotiques sans tenir compte des durées de prescription maximales réglementaires (incluant la période de sevrage) et de les reconduire sans réévaluation régulière. Les durées de prescription doivent être courtes et ne pas excéder : 4 à 12 semaines pour les anxiolytiques ; 2 à 4 semaines pour les hypnotiques (2 semaines pour le triazolam).
4. Il n’y a pas lieu de prescrire un anxiolytique ou un hypnotique sans débuter par la posologie la plus faible, sans rechercher la posologie minimale efficace pour chaque patient, ni de dépasser les posologies maximales recommandées.

Références Médicales Opposables de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS, novembre 2003, http://agmed.sante.gouv.fr).

« Dans la prise en charge du TOC, les antidépresseurs sérotoninergiques, les thérapies comportementales et cognitives ainsi que l’association des deux traitements (médicamenteux et psychothérapeutique) ont prouvé leur efficacité et permettent d’améliorer nettement les deux tiers des patients et d’en guérir environ 20 %. Les thérapies familiales ou de groupe seraient envisagées en seconde intention.
Le traitement médicamenteux de première intention préconise la prescription des inhibiteurs de recapture de la sérotonine sélectifs (IRSS) et, dans un deuxième temps, le recours à la Clomipramine uniquement après 2 à 3 essais d’IRSS sans succès. En cas de résistance ou d’intolérance aux IRSS, une autre monothérapie peut être envisagée : les inhibiteurs de la monoamine oxydase ou la Venlafaxine. Malgré un traitement bien conduit certains patients demeurent réfractaires et peuvent faire l’ objet d’une indication de neurochirurgie fonctionnelle. »

- OU TROUVER DE L’AIDE ?

Le médecin généraliste

Il est conseillé de demander l’avis de son médecin généraliste, qui peut, le cas échéant orienter vers un spécialiste ou une consultation spécialisée.

Les centres médico-psychologiques (CMP)

Les services de psychiatrie publique proposent des consultations et des prises en charge pour tous les troubles psychiques. Les consultations sont prises en charge par la sécurité sociale. Se renseigner auprès du CMP le plus proche du domicile.

Certains hôpitaux proposent des services spécialisés dans la prise en charge de ce type de troubles.

Les associations de psychothérapeutes professionnels

Les associations de psychothérapeutes professionnels peuvent renseigner sur les psychothérapies, la formation de leurs membres et fournir les adresses des consultations privées.

Les associations de patients et de proches

Elles regroupent des personnes souffrant de troubles psychiques et proposent des groupes de paroles, des lignes d’écoute téléphonique, des conseils et de l’entraide.

Aller au contenu principal