Dans cette revue, où les professionnels partagent leurs préoccupations, certains n’ont pas manqué de se poser la question de savoir jusqu’à quel point leurs pratiques sont tributaires de l’air du temps. G. Danon et A. Saint-Cast ont choisi de le faire à partir d’enfants qualifiés de violents.
Chroniqueur de l’évolution des relations au sein de la famille, D. Marcelli les met en scène autour de la paire de chaussures que, génération après génération, les enfants laissent traîner. Avec le XXe siècle qui s’est achevé hier, normes et consensus auraient disparu, laissant chaque famille face à la terrible liberté d’inventer son autorité. Guy Raymond pense qu’il faut plutôt parler, aujourd’hui, d’accompagnement de l’enfant vers la maturité. Les concepts juridiques ont évolué si vite qu’il nous a semblé utile de demander à une professionnelle de l’action sociale (A. Bouyx) et à un magistrat (A. Vogelweith) de faire le point pour les praticiens de l’aide sociale à l’enfance. Certains parents découvrent, avec soulagement, que la loi leur donne des références et précise leurs responsabilités (M. Bonnefond). D’autres, que leur histoire a privé de modèles, peuvent en trouver dans les valeurs et les attitudes des professionnels, qui les soutiennent dans l’éducation de leurs enfants (D. Batisse-Coat). Car, entre parents et enfants, l’histoire commence très tôt, alors que l’enfant est encore à naître (S. Missonnier) et l’on observe comment, autour de la naissance, s’articulent de conflits d’autorité.
Est-il possible, sans autorité reconnue à l’institution, de les faire entrer dans « un monde commun » ? s’inquiètent A. Seksig et Th. Baranger. Leurs institutions – l’école et la justice – ont perdu une part de leur autorité. A l’instar de chaque parent qui doit construire son autorité, le juge doit légitimer la sienne auprès des familles et donner du sens à ses décisions . Il en va de même pour le conseiller principal d’éducation, chargé de donner du sens à la scolarité des élèves. Ph. Daviaud et J. Poullaouec rappellent que c’est en 1970 – date du passage de la puissance paternelle à l’autorité parentale, est-ce un hasard ? -, que le conseiller principal d’éducation a remplacé celui qui a été la figure de l’autorité pour des générations de lycéens : le surveillant général. Ph. Jeammet souligne que le danger serait que les adultes refusent de confronter les enfants à la frustration parce que ces derniers ont besoin de limites pour se construire.
D. Laura évoque la quête des adolescents de figures paternelles, dans cette période de leur vie où s’élargit le champ des autorités. Dans les lieux de soins où ils sont accueillis, ils remettent en scène les modes de relation qui leur sont familiers et sollicitent les professionnels au-delà de leur mission initiale. Ch. Ponsar et M. Vibert montrent les difficultés de l’exercice. Les dérapages, les malaises des adolescents, leurs revendications et leurs réussites, mettent en lumière la vraie nature de l’autorité, ou plutôt sa culture (I. Darrault-Harris). L’autorité n’a-t-elle pas toujours été une énigme, le résultat non programmable de la relation entre deux individus ?