Paris, De Vecchi, 2009. 413 p.
Robert ARNAUT est producteur à Radio France et écrivain. Pendant plus de vingt ans, il a sillonné l’Afrique pour la collecte des traditions orales, et ses reportages l’ont souvent mis en présence d’hommes dont la personnalité était à l’échelle du continent africain. Henri Collomb est l’un de ces personnages hors du commun.
Une réédition d’une biographie tout à fait intéressante du fondateur de « l’école de Dakar » (Hôpital de Fann, 1960-1970), qui fut également un lieu de recherche dynamique (aujourd’hui encore autour notamment de René Collignon et de la revue Psychopathologie Africaine), propice au développement d’une partie de l’anthropologie africaniste française.
À l’heure où l’actualité éclaire le domaine de la santé mentale, où les établissements ouverts sont remis en question, où les pouvoirs publics s’apprêtent à mettre en chantier des lieux d’enfermement nouveaux, un regard sur l’un des pionniers de la psychiatrie sociale s’impose d’autant plus qu’il s’agit d’un homme et d’un destin hors série. Henri Collomb semble avoir rendez-vous avec l’histoire en commençant sa carrière à Djibouti au moment où éclate la deuxième guerre mondiale. Familier des tribus nomades, des rebelles, des contrebandiers, médecin particulier du Roi des rois en Ethiopie, chef du service de santé du corps expéditionnaire au Viêt-Nam, ce jeune médecin militaire est, avant tout, tourné vers l’Autre. Observateur des cultures et des traditions, ami de Senghor, d’Haïlé Sélassié et de Castro, il y a dans cet homme étonnant du Saint-John Perse, du Rimbaud et du Saint-Exupéry. Abordant avec son avion personnel les endroits les plus reculés où sévissent les maladies endémiques, rendant visite aux guérisseurs, aux féticheurs, aux magiciens de la brousse et participant à leur rite, le « Grand Sorcier blanc » acquiert en Afrique une dimension peu commune. Il traverse son siècle comme une comète, laissant derrière lui la frange lumineuse d’une pensée qui a donné naissance à l' »École de Dakar ». Ses publications, ses communications dans tous les congrès médicaux du monde l’ont fait apparaître, pendant vingt ans, comme un marginal de la psychiatrie, le temps de remettre en cause toutes les méthodes en cours.