« Dossier discriminations raciales ». Ce dossier est proposé par le Groupe d’étude et de lutte contre les discriminations raciales (Geld).
Ce dossier, proposé par le Geld, tente de donner une réponse à toutes les questions sur la lutte contre les discriminations aujourd’hui en France tout en proposant à ceux qui souhaitent approfondir le sujet un maximum de ressources pertinentes (sites et pages Internet, études et rapports, outils pédagogiques, films, etc.).
Mots-clés : lutte contre les discriminations, racisme, antisémitisme, égalité, discriminations raciales.
Introduction :
La France, une terre d’immigration :
La France est depuis plus d’un siècle, terre d’immigration. Sa tradition républicaine est construite autour de la vision encyclopédiste de l’égalité, consacrée par la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen de 1789, fondée sur une conception absolue de l’être humain indissociable du respect de sa dignité, des droits de l’homme. L’Etat français a donc structuré sa vocation d’accueil autour de la construction d’une politique volontariste d’intégration : permettre aux immigrés de travailler et de vivre normalement en France, et à leurs enfants d’y suivre des études et de devenir français.
La nécessité de mettre en place une politique de lutte contre le racisme et les discriminations raciales :
La deuxième guerre mondiale marque une prise de conscience de la nécessité d’affirmer un refus du racisme dans les textes constitutionnels par les préambules de la Constitution de 1958 et de la Constitution de 1946. Ces textes affichent une volonté de lutter contre le racisme fondée sur une conception absolue de l’être humain et de l’universalité du principe d’égalité. Face à une montée du racisme à l’égard des populations immigrées et issues de l’immigration, les associations de lutte contre le racisme, les acteurs de la politique d’intégration et les gouvernements successifs ont, depuis le début des années 1990, pris conscience de l’enjeu que représente dans notre société la mise en place d’une véritable politique de lutte contre le racisme et les discriminations raciales.
Les discriminations raciales mettent en péril les principes fondateurs de la République :
La confrontation répétée et quotidienne au racisme et à la discrimination raciale de citoyens français à part entière, parfaitement intégrés, met en péril les principes fondateurs de la République, sa cohésion et l’éthique de la société française. Trop de citoyens sont quotidiennement confrontés à la discrimination raciale dans toutes les dimensions de leur existence simplement parce que leur couleur de peau ou leur patronyme est différent. Certains employeurs refusent de les embaucher malgré leurs compétences, des propriétaires ne veulent pas leur louer un appartement ou exigent des garanties financières supplémentaires par rapport à un “vrai français”, des discothèques ou des restaurants leurs ferment leurs portes sans aucune raison objective, etc.
Venir en aide aux victimes, sensibiliser la société civile et les décideurs politiques :
Etre victime de discrimination raciale, c’est supporter régulièrement et de manière répétée des injustices manifestes qui nient le droit de tout être humain à être respecté. C’est être traité comme un “sous-citoyen” à la merci de l’arbitraire, en somme c’est pratiquer l’apartheid en France. Trop longtemps banalisés, ces comportements ont des conséquences sociales et humaines désastreuses. Les études menées sur cette question ont mis en évidence la nécessité de dépasser les simples déclarations d’intention pour venir directement en aide aux victimes, les assister dans leurs démarches et, en parallèle, sensibiliser la société civile et les décideurs politiques à cette intolérable atteinte au principe de l’égalité républicaine.
Un dossier complet pour présenter les grandes lignes et les principaux enjeux de la lutte contre les discriminations raciales :
La discrimination raciale : définition.
Mais où en est la lutte contre les discriminations aujourd’hui en France ? , quels sont les moyens d’action des victimes, qui peut les aider dans leurs démarches… Ce dossier tente de donner une réponse à toutes ces questions tout en proposant à ceux qui souhaitent approfondir le sujet un maximum de ressources pertinentes (sites et pages Internet, études et rapports, outils pédagogiques, films, etc.).
Il ne s’agit donc pas de réécrire ce qui existe mais, d’une part, de présenter les grandes lignes et les principaux enjeux de la lutte contre les discriminations raciales et, d’autre part, de référencer les ressources documentaires qui nous semblent être les plus pertinentes afin de mutualiser les connaissances en la matière.
À retenir : la prohibition de toute discrimination raciale vise à garantir le respect du principe d’égalité sur le territoire français au profit de l’ensemble des personnes qui y résident. Il est donc faux de prétendre que le délit de discrimination serait une infraction “à sens unique” pour laquelle seuls les étrangers ou les français d’origine étrangère pourraient porter plainte : parce que la loi est la même pour tous, toute différence de traitement fondée sur l’origine, réelle ou supposée, est interdite et ce quelque en soit les auteurs et les victimes.
La discrimination est une différence arbitraire de traitement pratiquée aux dépens d’une personne ou d’un groupe de personnes, une violation du principe fondamental d’égalité. La discrimination raciale consiste donc à traiter de manière défavorable une personne ou un groupe de personnes en raison de leur origine réelle ou supposée, leur appartenance ou non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une “race”, leur apparence physique, ou bien encore leur patronyme.
La discrimination raciale est l’une des manifestations possibles du racisme, au coté des propos racistes (atteinte morale par des paroles ou des écrits) et des violences racistes (atteinte à l’intégrité physique ou psychique). Cependant, la discrimination raciale n’est pas nécessairement accompagnée de propos et/ou de violences racistes et inversement, des propos ou violences racistes peuvent exister sans pour autant qu’il y ait discrimination.
Elle est prohibée en matière d’emploi, de logement, de loisirs, de santé, d’éducation, dans les relations entre les usagers et les services publics, etc. La discrimination raciale peut être directe ou indirecte, elle peut également se manifester sous la forme d’un harcèlement moral.
La discrimination directe :
C’est le mode le plus connu, et le mieux appréhendé par notre ordre juridique, de la discrimination raciale. L’auteur opère alors volontairement une distinction entre les candidats, les clients ou les usagers, en raison de leur origine réelle ou supposée. Selon les circonstances et la psychologie de l’auteur, elle peut être apparente ou dissimulée.
Le comportement discriminatoire apparent est aisément identifiable puisqu’il suppose que l’auteur exprime, par ces propos ou son comportement, une volonté claire de violer le principe d’égalité.
Exemples : offre d’emploi contenant la mention “cherche français d’origine” ou “employé Bleu-blanc-rouge”, refus de vente accompagné de propos tels que “je ne sers pas les étrangers”, consigne donnée par un propriétaire à l’agence immobilière de ne pas proposer la location de son appartement à des “personnes de couleur”, etc.
Le comportement discriminatoire dissimulé procède lui d’une logique beaucoup plus pernicieuse. Face à la réprobation sociale et au risque de poursuites, l’auteur de la discrimination dissimule son acte en donnant à la victime une explication plausible à son refus.
Exemples : prétendre qu’il s’agit d’un “Club privé” pour procéder à une sélection ethnique à l’entrée d’une discothèque, qu’un appartement est “déjà loué” ou qu’un poste est “déjà pourvu” en vue d’évincer le demandeur, demander de fournir des pièces complémentaires pour un dossier (alors même que ces pièces ont déjà été fournies) afin de retarder la procédure ou d’empêcher le demandeur de bénéficier d’un droit qui lui est accordé par la loi, etc.
La discrimination indirecte :
Elle ne procède pas d’un comportement individuel mais se produit lorsque l’application d’une règle apparemment neutre entraîne en pratique un désavantage particulier pour des personnes d’une “race” ou d’une origine ethnique donnée. Elle ne peut être révélée que par une analyse statistique détaillée qui déterminera si, en pratique, la mise en uvre de cette règle lèse majoritairement des personnes ayant en commun la même origine (réelle ou supposée).
Le harcèlement moral
Il consiste en des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Ce comportement est une forme de discrimination raciale lorsqu’il s’avère être lié à l’origine (réelle ou supposée) de la victime.
Exemples : brimades, “mises au placard” et humiliations par un supérieur hiérarchique raciste qui pousse un salarié à démissionner ou à commettre une faute qui “permettra” de le licencier, etc.
La discrimination raciale au quotidien :
Introduction : La discrimination raciale est un comportement illégal qui intervient en pratique dans tous les domaines de la vie quotidienne : emploi, logement, accès aux loisirs, aux services publics, à l’éducation et à la santé. Les différents médias participent à la diffusion et à la banalisation du racisme.
La discrimination raciale est un comportement illégal qui intervient en pratique dans tous les domaines de la vie quotidienne. Elle frappe en premier lieu le secteur de l’emploi, générant ainsi des difficultés socio-économiques supplémentaires pour des populations déjà stigmatisées.
La discrimination raciale se manifeste également dans le logement et l’accès aux loisirs ce qui renforce le sentiment d’injustice de victimes souvent démunies face à cette intolérable négation de leur droit à être respectées et dignement traitées.
De plus, elle sous-tend des pratiques de rejet ou d’isolement de certaines populations qui ne bénéficient plus d’un accès aux services publics, à l’éducation ou à la santé conforme au principe d’égalité républicaine. Enfin, les différents médias participent à la diffusion et à la banalisation du racisme, en particulier sur le réseau Internet où circule des propos incitant à la discrimination raciale. Plus généralement, la sous-représentation des personnes d’origine étrangère et l’usage d’un vocabulaire abusivement ethnicisé dans les médias entretiennent les amalgames et les préjugés.
La vie professionnelle :
L’accès au travail est un droit fondamental. Si les discriminations raciales sur le marché du travail ont toujours existé, elles ont aujourd’hui tendance à se banaliser sans qu’elles reposent pour autant sur des préjugés ou des comportements racistes. Depuis une quinzaine d’années, le phénomène touche de façon plus sensible les jeunes de la seconde et troisième génération.
L’emploi, le domaine le plus touché par les discriminations :
Près de 34% des signalements émis par le biais du 114 (entre le 16 mai 2000 et le 15 mai 2002) concerne le domaine de l’emploi et de l’accès à la formation professionnelle :
21% des appels concerne la vie professionnelle,
10% relève de l’accès à l’emploi,
3%concerne la formation professionnelle.
Les discriminations à l’emploi est le domaine où les expériences de discriminations sont le plus signalés par les appelants. S’il apparaît comme le plus dénoncé, il est également celui où les avancées sont les plus significatives en matière de réflexions et d’actions – même si la reconnaissance politique de l’existence de ces discriminations est arrivée bien tardivement. De nombreux colloques et études réalisées au cours de ces dernières années ont permis à ce titre de sensibiliser l’opinion publique.
L’emploi, étant un des principaux facteurs d’intégration, les pratiques discriminatoires dans ce domaine produisent bien souvent d’autres inégalités en chaîne dans le domaine du logement, de la santé, à l’école…
Des pratiques qui peuvent survenir à toutes les étapes de la vie professionnelle :
Les discriminations sur le marché du travail peuvent prendre différentes formes : discriminations à l’embauche, dans l’accès à la formation, dans l’évolution des carrières, les relations de travail au sein de l’entreprise, harcèlement au travail, brimades, licenciements abusifs, niveau de rémunération plus bas…
Plusieurs éléments permettent de supposer ou de voir qu’une discrimination s’opère. Dans le domaine de l’embauche, les discriminations peuvent se manifester ouvertement dans les offres d’emploi avec la mention “profil race blanche”. Mais ces cas sont très rares et le plus souvent des stratégies de contournement sont utilisées par écrit et sous la forme d’un système de code (exemple : le code BBR qui signifie Bleu Blanc Rouge). Ces codes évitent bien entendu de parler de race ou d’un quelconque signe distinctif visible. D’autres employeurs ont recours à des critères éliminant de fait les étrangers telle que l’exigence d’un dialecte. Mais les offres discriminatoires ne représentent que la partie visible de l’iceberg.
Remarque : Contrairement à une idée reçue, la liberté de l’employeur dans le choix des candidats lors d’une procédure d’embauche n’est pas illimitée. L’employeur ne peut pas agir de manière arbitraire mais il doit fonder sa décision sur des critères objectifs (formation, expérience, compétence technique, connaissance du terrain, etc.). S’il refuse d’office un candidat qui a le profil correspondant au poste uniquement parce que sa couleur de peau lui déplaît, non seulement cela représente un manque à gagner pour l’entreprise mais en plus il commet le délit de discrimination et pourra être condamné.
Les emplois fermés : une forme particulière de discriminations :
La question des “emplois fermés”, c’est-à-dire des emplois réservés aux nationaux, relève également des inégalités structurelles du marché du travail même si elle demeure très controversée. De nombreuses personnes, lors des débats qui ont fait suite à la note du Geld sur “les emplois fermés aux étrangers”, ont en effet rejeté l’idée que la loi française puisse être discriminatoire.
Concrètement, les étrangers résidant régulièrement en France mais qui sont ressortissants de pays qui ne sont pas membres de l’union européenne sont exclus d’environ 7 millions de postes sur le marché du travail français. Le débat engagé sur cette question, et l’absence de justifications objectives à certaines de ces restrictions, a entraîné la suppression de la condition de nationalité à la RATP et la Sécurité Sociale.
Des préjugés aux représentations négatives :
La part des préjugés et représentations négatives est indéniable dans les situations de discriminations raciales. Ces pratiques discriminatoires reposent, bien souvent, sur la détection de certains signes visibles, assimilés dans notre société à des stigmates. Autrement dit, ce qui peut constituer une situation de discrimination raciale n’est pas dans le fait d’être réellement d’origine étrangère mais plutôt d’avoir l’air d’être lié à l’immigration. Parmi ces éléments de frein détectés par l’employeur, on peut citer : le physique, le critère de sexe, le critère de l’age, les noms et/ou prénoms à consonance étrangère, le lieu d’habitation.
D’autres éléments sont invoqués pour justifier ces pratiques, des éléments invoqués comme objectifs par les employeurs et les responsables des centres de formation : le déficit de qualification et de maîtrise de la langue française.
Les recours possibles :
Le dispositif juridique a été renforcé par la loi relative à la lutte contre les discriminations du 16 novembre 2001epuis novembre 2001. En cas de discriminations sur le marché du travail, la victime pourra saisir le Conseil des Prud’hommes et/ou le Tribunal correctionnel, avec le soutien des syndicats ou des associations de lutte contre le racisme. Pour en savoir plus : Que dit la loi ?
Pour vous aider :
Afin de résoudre les situations de discrimination, une personne s’estimant victime de discrimination raciale ou de harcèlement au travail peut interpeller les différents acteurs du secteur de l’emploi pour tenter d’obtenir le règlement de sa situation :
En premier lieu, c’est à l’employeur de veiller au respect des droits et libertés des salariés, et assurer un environnement de travail exempt de discrimination et de harcèlement ;
Le délégué du personnel, le comité d’entreprise, ou le responsable des ressources humaines sont compétents pour saisir l’employeur s’ils constatent une atteinte aux droits et libertés du salarié et, en cas d’inaction de l’employeur ou d’absence de réponse satisfaisante, pour saisir le Conseil de prud’hommes ;
Les syndicats et les associations de lutte contre le racisme se sont naturellement mobilisés sur les questions d’égalité des droits au travail et de lutte contre les discriminations raciales ;
L’inspection du travail contrôle le respect des dispositions du Code du travail, mène des enquêtes et peut dresser procès-verbal des infractions qu’elle constate. Ses coordonnées doivent obligatoirement être affichées dans l’entreprise.
Les DDTEFP (Directions départementales, de l’emploi et de la formation professionnelle) doivent veiller au respect du droit du travail.
Quelques initiatives de prévention :
Les pouvoirs publics ont encouragé la mise en oeuvre d’un certain nombre de dispositif de prévention parmi lesquels le parrainage un des plus mobilisés et des plus efficaces à moyen terme. Des initiatives de sensibilisation des acteurs publics et privés à la lutte contre les discriminations sur le marché du travail ont été également mises en uvre au niveau national et local.
Le parrainage institue un accompagnement personnalisé des jeunes par des bénévoles connaissant le monde de l’entreprise. Ce dispositif donne de très bons résultats avec plus de 60% d’accès à l’emploi ou à la formation qualifiante. Ces actions sont complétées par une démarche d’informations auprès des jeunes afin de leur faciliter l’accès aux stages et à l’emploi. Présentation
Adecco est la première entreprise de travail temporaire à avoir signé un accord cadre en mars 2002 avec l’Etat (Ministère de l’emploi et de la solidarité, la Direction de la Population et des Migrations et le Fonds d’Action et de Soutien pour l’Intégration et la Lutte contre les Discriminations) ; Site Adecco
L’Assemblée permanente des Chambres des Métiers (APCM) a réalisé un CD-Rom sur la lutte contre les discriminations comme support aux actions de formation / sensibilisation qu’elle mène auprès de l’ensemble des membres de son réseau ; Présentation
Le guide pratique Lutter contre les discriminations raciales sur le marché du travail a été réalisé dans le cadre des Contrats de ville du XIIème plan à destination des intermédiaires de l’emploi, des acteurs des contrats de ville et de tous les acteurs de la société civile impliqués dans cette lutte (missions locales, CDAD, associations, syndicats…) ; Présentation
Le programme d’initiative communautaire Equal a été initié par l’Union européenne pour la période 2000-2006 afin de financer des expériences innovantes de lutte contre les discriminations dans le monde du travail et de l’emploi en Europe ; Présentation
Les chartes nationales et locales signées par des acteurs de l’emploi et de l’insertion professionnelle marquent leur engagement au respect de principe d’égalité des chances et à l’adoption de bonnes conduites. Ces chartes constituent un véritable support de sensibilisation et de mobilisation collective.
Le logement :
Le droit au logement pour tous est un droit fondamental qui dispose d’un cadre légal et constitutionnel. Les discriminations au logement concernent des inégalités d’accès au parc social comme au parc privé. Les discriminations raciales au logement se manifestent souvent par la concentration ségrégation des populations d’origine étrangère, réelle ou supposée, dans les secteurs les plus dévalorisées du parc locatif qu’il soit social ou privé.
Le droit au logement pour tous est un droit fondamental qui dispose d’un cadre légal et constitutionnel. Les discriminations au logement concernent des inégalités d’accès au parc social comme au parc privé. Il peut s’agir :
de refus de vente ou de location ;
de l’exigence de garanties financières supplémentaires pour les candidats étrangers ;
d’un refus injustifié de prendre en compte une demande de logement social ;
de la non-restitution sans motif valable du dépôt de garantie ou “caution” ;
de l’utilisation abusive par une municipalité de son du droit de préemption pour empêcher une vente en raison de l’origine de l’acquéreur ;
etc. Les discriminations raciales au logement se manifestent enfin par la concentration ségrégation des populations d’origine étrangère, réelle ou supposée, dans les secteurs les plus dévalorisées du parc locatif qu’il soit social ou privé.
Des chiffres : Sur les 10 209 signalements émis par le biais du 114 en deux ans d’activité, 9% concernait le domaine de l’habitat : 5% pour des litiges liés au logement social et 4% au logement privé.
Les discriminations dans l’accès au logement privé :
La connaissance des mécanismes discriminatoires à l’uvre est encore assez faible, mais l’on constate que les problèmes rencontrés relèvent essentiellement de comportements individuels imputables soit à des propriétaires qui sélectionnent leurs locataires dans le complet mépris des notions de respect et d’égalité, soit à des intermédiaires qui se conforment (ou pensent se conformer) aux exigences de ces mêmes propriétaires.
Remarque : Les propriétaires qui pratiquent une sélection discriminatoire des candidats-locataires pensent (ou préfèrent penser) que leur droit de propriété les autorise à agir ainsi. En réalité, le fait d’opérer un choix arbitraire et raciste, ou de poser des conditions supplémentaires pour les personnes étrangères ou d’origine étrangère caractérise l’infraction pénale de discrimination.
Les résistances ainsi rencontrées dans le parc privé contribuent à renforcer la pression et les attentes dans le parc social qui doit absorber tous ceux à qui “on ne veut pas louer”.
Les discriminations dans l’accès au logement social :
La question des discriminations dans l’accès au logement social est un sujet récemment apparu sur la scène publique. La polémique mettant en cause l’utilisation de critères ethniques par les HLM en 2000 et la publication de la note du Groupe d’Etudes et de Lutte contre les Discriminations (Geld) ont témoigné de l’ampleur et de la gravité des pratiques de discriminations à l’uvre dans le domaine de l’accès au logement et ont contribué à sensibiliser l’opinion publique.
Les tensions sur le marché de l’habitat en général et l’application (dévoyée ou pas) de l’objectif de mixité aboutissent en pratique à renforcer les processus de ségrégation ethnique. Enfin et surtout, aucune institution n’est réellement comptable de la situation des personnes discriminées du fait de l’éclatement de la gestion des attributions entre des multiples acteurs poursuivant des objectifs différents voire contradictoires. Pour remédier à ce phénomène de “discrimination institutionnelle”, principalement imputable à l’organisation même du système d’attribution, des dispositifs publics de droit commun ont été mis en place :
un numéro départemental unique est attribué au candidat lors de la demande de logement afin qu’il soit tenu informé de l’avancement de son dossier et les décisions de refus doivent être motivées ;
les conférences intercommunales pour le logement sont chargées d’élaborer un programme pour l’accueil des personnes défavorisées.
Les recours possibles :
Les auteurs de pratiques discriminatoires dans le logement social ou privé peuvent faire l’objet de poursuites devant le Tribunal correctionnel. De plus, la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 énonce expressément que ces pratiques peuvent faire l’objet de poursuites civiles lorsque elles concernent la location à usage d’habitation principale.
Les services publics :
Que ce soit dans les relations entre usagers et services publics ou au sein même des services publics (recrutement et vie professionnelle des agents contractuels et des fonctionnaires), la loi interdit toute différence de traitement fondée sur l’origine réelle ou supposée.
Le principe d’égalité est garant de la non-discrimination dans les services publics. Le principe d’égalité des usagers devant le service public interdit, d’une part, qu’un agent puisse volontairement traiter de manière défavorable un usager et, d’autre part, que les règles de fonctionnement d’un service public puisse aboutir à défavoriser systématiquement une personne ou un groupe de personnes en raison de leur origine réelle ou supposée.
Des pratiques discriminatoires peuvent également intervenir dans les relations au sein des services publics. La loi Le Pors du 13 juillet 1983 qui fixe les droits et les obligations des fonctionnaires prohibe expressément le harcèlement moral et la discrimination raciale.
Elle stipule qu’aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison notamment de leur origine, de leur patronyme, de leur apparence physique ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sous peines notamment de sanctions disciplinaires
Des pratiques insidieuses :
Les pratiques discriminatoires à l’égard des usagers peuvent prendre diverses formes, clairement affichées ou le plus souvent insidieuses. Elles peuvent ainsi se manifester par :
les contrôles d’identité au faciès ;
le refus d’un droit accordé par la loi (refus de recevoir et/ou de traiter un dossier d’aide au logement fondé sur le patronyme d’une personne, alors même qu’elle remplit l’ensemble des conditions et fournit les documents nécessaires) ;
l’entrave à l’exercice normal d’une activité économique quelconque (exemple : des actes d’intimidation opérés par un agent administratif qui tendent à dissuader l’installation d’un commerçant dans un quartier où il est jugé indésirable en raison de sa couleur de peau) ;
l’exigence de documents non indispensables pour instruire des dossiers ou obtenir des documents ;
le comportement, parfois agressif, de certains agents d’accueil ;
le traitement subjectif de certains dossiers…
Recours possibles
L’usager ou à l’agent qui s’estime victime d’une discrimination peut solliciter la révision de la décision prise à son égard et/ou la réparation d’un préjudice qu’il estime être imputable à l’action du service public en exerçant un recours amiable soit directement auprès de l’auteur de la décision (recours gracieux) ou auprès de son supérieur hiérarchique (recours hiérarchique) en vue d’un réexamen de sa situation.L’autorité ainsi saisie appréciera librement s’il estime que la réclamation est justifiée ou non et les suites à lui donner. La décision de rejet d’un recours gracieux ou hiérarchique peut être explicite (écrite ou orale) ou implicite (le silence de deux mois de l’administration est assimilé à un refus).
En cas de rejet de sa demande, l’usager ou l’agent qui s’estime victime de discrimination peut demander l’annulation de la décision litigieuse et/ou l’obtention de dommages et intérêts. Cette demande doit en principe être adressée :
au Tribunal administratif dans les 2 mois qui suivent le refus lorsque le comportement discriminatoire concerne un service public administratif (Etat, collectivités territoriales et établissements publics administratifs, etc.) ;
au juge civil lorsque le comportement discriminatoire concerne un service public industriel et commercial (services de distribution de l’eau, du gaz et de l’électricité, transports routiers et ferroviaires, exploitation de parcs de stationnement ou d’installations sportives et de loisirs, etc.) ; Au plan pénal, l’agent qui se rend personnellement et volontairement coupable de discrimination raciale pourra, comme tout autre citoyen, être poursuivi et sanctionné devant le Tribunal correctionnel.
L’éducation :
L’école est le principal vecteur de socialisation et d’intégration. Sa contribution est d’autant plus essentielle à la vie publique qu’elle a en effet pour mission de favoriser l’apprentissage d’une culture ainsi que la connaissance et la compréhension des droits et des obligations des citoyens. C’est dans cette école que les enfants pourront apprendre à réfuter les raisonnements manichéens, les discours sectaires et intégristes, à refuser le racisme, la xénophobie et les discriminations.
La crise du rôle intégrateur de l’école :
L’école est gratuite, laïque et obligatoire. Elle est au cur de l’histoire de la République française et le préambule de la Constitution de 1946 énonce que “la Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque est un devoir national”. Ce droit à l’instruction a fait de l’école le principal lieu d’intégration des immigrés à la communauté nationale et a permis de fait une mobilité sociale et la construction d’une élite populaire. Ce rôle intégrateur de l’école est indéniable dans les parcours d’intégration d’une partie des jeunes issus de l’immigration.
Mais, depuis quelques années, l’institution scolaire est en crise et joue dans une moindre mesure le rôle d’ascenseur social. Dans un contexte de massification scolaire, de ségrégation urbaine et de fracture sociale, les inégalités sont reproduites : inégalités sociales et représentations négatives liés à l’origine ethnique de certains élèves se confondent et se cristallisent dans des quartiers en difficulté. Les processus en uvre sont complexes. Des études sont en cours, menées par des chercheurs comme J.P Payet, tentent de déconstruire les mécanismes en oeuvre. Voici toutefois quelques situations qui peuvent témoigner d’une situation de discriminations dans ce domaine.
Les discriminations raciales dans l’enseignement ?
Même si l’institution se pense et se veut préserver de tout racisme, elle n’est pas imperméable à ce phénomène qui prend en son sein des formes beaucoup plus insidieuses. Il s’agit davantage d’inégalités dans la réussite scolaire qui s’expliquent notamment par la constitution d’établissements ghettos et une orientation scolaire limitative.
Les “établissements ghettos” située dans des quartiers dit “sensibles” sont le reflet de la ségrégation urbaine et concentrent majoritairement des élèves étrangers ou d’origine étrangère. Ces établissements sont stigmatisés et souffrent de représentations négatives liées à la présence de problèmes sociaux, à la violence et à la délinquance. Cette situation est renforcée par le développement du “zapping scolaire” qui consiste pour un nombre croissant de parents à opter pour les établissements privés ou à obtenir une dérogation afin d’éviter ces établissements “sensibles”. Selon M. Gabriel Langouet, professeur de sociologie à la Sorbonne, cette pratique concernerait aujourd’hui près d’une famille sur deux.
L’orientation scolaire des élèves issus de l’immigration semble abusivement tournées vers les filières techniques, ce qui est souvent vécue comme un échec et une incapacité à suivre des filières générales. Parfois, les jeunes eux-mêmes s’auto censure dans le choix des filières, anticipant ainsi sur les discriminations auxquelles ils pourraient ensuite s’exposer dans leurs recherches d’emploi.
Enfin, l’échec scolaire frappe davantage les jeunes issus de l’immigration qui demeurent moins longtemps au sein du système éducatif et le quittent après avoir été proportionnellement plus nombreux dans les filières les moins valorisés. Cependant, il faut souligner que le niveau socio-économique atteint par les parents eux-mêmes reste un facteur particulièrement déterminant dans les difficultés rencontrées par ces élèves
Les inégalités sociales au cur des inégalités scolaires :
Le critère de l’origine ethnique est rarement en soi le seul élément déterminant dans la production de discriminations raciales. En fait l’origine sociale est un facteur bien plus déterminant et influent sur les chances de réussite scolaires.
A cela s’ajoutent les logiques de marché et de concurrence entre établissements, l’impact des représentations négatives portée sur certains quartiers. De fait, tous les établissements scolaires ne se valent pas et les cursus scolaires diffèrent fortement d’un collège de centre ville à un collège de banlieue.
Dans ce contexte, il faut comprendre que l’enjeu pour les parents les mieux informés, va consister à préparer la meilleure entrée possible sur le marché du travail dans un contexte économique de crise ou plutôt de sortie de crise.
La santé :
Les discriminations dans l’accès aux soins concernent une différence de traitement fondée sur le critère de l’origine ethnique réelle ou supposée ou de la nationalité. Les situations de traitement défavorable en matière de soins sont très hétérogènes et peuvent concerner tant l’accès aux soins que la qualité des soins, elles peuvent reposer sur une intention explicite ou être le fait de logiques institutionnelles.
La population visée concerne à la fois les étrangers en situation régulière, en situation irrégulière et la population française d’origine étrangère réelle ou supposée. Cependant, les pratiques discriminatoires concernent en premier lieu les étrangers qui sont sur-représentées dans les dispositifs d’accès aux soins mis en place par l’Etat (Couverture Maladie Universelle et Aide Médicale Etat) pour pallier les inégalités socio-économiques.
Quelques situations de discriminations :
Les discriminations raciales liées à l’origine étrangère réelle ou supposée reposent sur des représentations négatives à l’égard de la couleur de peau, de la consonance d’un patronyme, d’un attribut vestimentaire… Ces préjugés portent également sur des critères sociologiques d’appartenance à un groupe disqualifié (population étrangère, habitants de quartiers stigmatisés, situation socio-économique précaire). Ces représentations négatives peuvent se manifester de diverses manières :
des logiques de suspicion d’abus de soins voir de tricherie à l’égard de ces publics ;
l’exigence de documents non inscrits dans la loi pour instruire des dossiers donnant droit à la CMU ou à l’AME ;
des difficultés d’accès à des médicaments pour les personnes en situation irrégulière ;
difficultés d’accès aux soins pour les personnes séjournant de façon temporaire en France ;
le regroupement des patients étrangers en chambres collectives.Enfin, la différence de traitement peut être fondée sur l’intérêt supposé des soins dits “culturellement adapté”. Certains médecins ont tendance à adapter de manière un peu abusive des soins spécifiques en fonction de l’origine ethnique et culturelle de la personne. Les patients étrangers atteints d’une pathologie mentale sont par exemple régulièrement adressés à des psychiatres spécialisés en ethnopsychiatrie ;
Si la prise en compte de la spécificité du besoin et la mise en uvre d’un traitement adapté peut se révéler nécessaire pour la personne d’origine étrangère, réelle ou supposé, il n’en reste pas moins que ces motivations peuvent relever de pratiques discriminatoires.
Le cas particulier des personnes en situation irrégulière :
L’obligation déontologique de soigner tout malade est fondée sur le principe d’égalité. Alors que cette obligation s’est étendue dans les textes réglementaires, les étrangers en situation irrégulière ont dans les faits un droit d’accès aux soins limité.
Elles relèvent théoriquement de l’Aide Médicale d’Etat mais, depuis décembre 2002, elles doivent acquitter le forfait hospitalier en cas d’hospitalisation et le ticket modérateur pour les consultations.
Cette différence dans la réglementation fondée sur ne différence de statut n’est certes pas considéré juridiquement comme une discrimination prohibée mais elle peut conduire à certains abus et inégalités dans les modalités de traitement, en créant un terrain favorable au développement de la suspicion à l’égard de l’ensemble des personnes étrangères ou d’origine étrangère.
Les médias :
Les médias ne sont pas à l’abri de certaines dérives racistes. Ils sont parfois des lieux où se manifestent la haine raciale, des lieux où sont tenus des propos discriminatoires. Ils peuvent aussi devenir des instruments de propagande raciste utilisés par des organisations extrémistes pour faire passer des messages haineux et xénophobes.
Les propos discriminatoires :
La diffamation, l’injure, la provocation à la haine, à la violence et à la discrimination raciale, l’apologie et la contestation des crimes contre l’humanité sont prohibées par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui a notamment été modifiée par la loi “Pleven” du 1er juillet 1972 relative à la lutte contre le racisme.
La provocation à la discrimination raciale est un propos qui tend volontairement à susciter un sentiment de rejet et à adopter un comportement discriminatoire à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personne. Cette infraction est donc directement liée au délit de discrimination raciale qui est , puisqu’elle implique que la provocation ou l’incitation porte sur un comportement, la discrimination raciale, qui est prohibé le Code pénal.
Les propos racistes sont des délits si ils ont été tenus publiquement. Sont considérés comme publics les paroles, écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image, qui sont distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publiques ou diffusés par un moyen de communication audiovisuelle accessible à tous (presse, radio, TV, tracts, meeting électoral, etc.). Ils relèvent du Tribunal correctionnel.
Les propos racistes tenus dans un cadre privé constituent des contraventions qui peuvent être sanctionnées par le tribunal de police.
Attention : que les propos racistes aient été tenus et/ou diffusés publiquement ou dans un cadre purement privé, le délai de prescription n’est que de 3 mois. Passé ce délai, aucune poursuite ne pourra plus être exercée.
Le racisme sur Internet :
Le développement rapide du réseau Internet a permis la mise en place des réseaux de sites et de forums de discussion où les propos racistes et discriminatoires se sont diffusés rapidement et dans une relative impunité. Ces dérives ont suscité des interrogations quant aux possibilités légales de les empêcher.
Le réseau Internet est soumis au même régime que les médias classiques (télévision ou presse écrite). La toile est considérée comme un espace public sur lequel les propos racistes sont théoriquement interdits en application de la loi relative à la liberté de la presse.
En pratique, le délai de prescription de 3 mois édicté par cette loi est un obstacle majeur aux poursuites. La Cour de cassation a cependant indiqué à plusieurs reprises qu’il doit être respecté. Si les gouvernements successifs ont évoqué leur intention de mettre fin à cette contrainte et de soumettre les propos racistes publics au délai de prescription de droit commun de 3 années, aucun projet de loi n’a encore vu le jour.
En conséquences, les propos racistes et xénophobes ne peuvent actuellement pas faire l’objet de poursuites pénales au-delà d’un délai de 3 mois après leur mise à la disposition des internautes alors même que, à la différence d’un livre ou d’un article de journal, ils sont diffusés sur un support qui ne peut pas s’altérer et disparaître par le simple effet du temps.
La seconde difficulté tient au caractère mondial du réseau Internet : il est possible de diffuser en France depuis l’étranger des propos ouvertement racistes, et la justice française est actuellement dépourvue de moyens d’action réellement efficaces.
Exemples : Affaire YAHOO : dans une affaire de vente aux enchères sur Internet d’objets nazis, le Tribunal de grande instance de Paris (TGI Paris 20/11/2000 UEJF-LICRA-MRAP c/ YAHOO) a condamné sous astreinte, d’une part, le portail Internet américain “Yahoo ! Inc.” à empêcher toute consultation du service relatif à ces objets et, d’autre part, le portail français “Yahoo France” à mettre en place un système d’identification des internautes français, afin que ceux-ci soit expressément informés que la consultation de sites proposant des objets nazis les exposent à des sanctions pénales. La société “Yahoo France” s’est conformée aux termes de cette ordonnance. L’entreprise américaine “Yahoo ! Inc.” quant à elle a introduit un recours préventif devant une cour californienne afin que soit déterminé si la décision française pouvait faire l’objet d’une exécution forcée aux Etats-Unis. Ìa Cour de San José (Californie) a estimé le 7 novembre 2001 qu’elle était incompatible avec le premier amendement de la constitution, garantissant la liberté d’expression, et ne pouvait donc pas s’imposer à une entreprise dont le siége est situé sur le territoire américain.
En 2001, l’association J’Accuse, avaient demandé le filtrage d’un portail baptisé “Front14” regroupant plus de 300 sites racistes qui diffusaient des propos ouvertement racistes, sexistes et homophobes dont les auteurs étaient souvent anonymes. Le juge avait alors condamné l’hébergeur du portail, domicilié aux Etats-Unis, ainsi que l’un des auteurs qui avait pu être identifié. Le juge sommait aussi les fournisseurs d’accès de sortir du discours de neutralité qui était le leur depuis le début de l’affaire, sans toutefois leur imposer de bloquer l’accès à Front 14.
Représentation des “étrangers” dans les médias :
En octobre 1999, le Conseil Supérieur de l’audiovisuel a réalisé une étude quantitative portant sur la représentation des personnes non européennes physiquement “typées” sur les cinq chaînes de télévision hertzienne. Elle constate que les jeux télévisés, les émissions d’information comme les fictions ne sont pas statistiquement représentatives de la diversité ethnico-culturelle de la société française.
De plus, le vocabulaire utilisé dans les médias pour traiter des questions d’intégration, d’immigration, de racisme, mais également de délinquance, de violences urbaines ou d’insécurité contribue à renforcer les préjugés et le racisme.
Les étrangers ou les français d’origine étrangère, et plus particulièrement ceux qui résident dans les “banlieues chaudes” sont en effet fréquemment stéréotypés et implicitement marginalisés. Ils constitueraient une population à part, une “minorité dangereuse”, alors même qu’ils sont les premières victimes de cette insécurité. Les images fortes (voitures incendiées, délinquants cagoulés, émeutes) font plus souvent les gros titres que les témoignages de ceux qui doivent supporter cette violence au quotidien.
Les loisirs :
Les discriminations dans l’accès aux discothèques sont celles qui ont été le plus fréquemment dénoncées et médiatisées, mais elles son également courantes dans l’accès aux clubs de loisirs, aux locations de vacances (campings, hôtels…) et dans les lieux de consommation (bars et restaurants).
Quelques chiffres : Sur les 10 209 signalements émis par le numéro vert 114 durant les deux premières années de son activité, environ 20 % porte sur des pratiques discriminatoires dans l’accès aux biens et aux services dont la moitié concerne l’accès aux discothèques.
Quelques situations de discriminations :
Les quotas raciaux : le propriétaire d’un camping a été condamné car il avait expressément refusé de recevoir des groupes de jeunes composés de plus de “50% d’enfants de couleur”. Il a cru pouvoir justifier ce refus en déclarant à une radio locale : “il est de notoriété publique que 90% de la délinquance des banlieues ce sont des beurs”, ce qui lui a valu une autre condamnation, pour propos racistes cette fois.
Le mensonge raciste : la gérante d’un camping a refusé l’accès à son camping à une jeune femme française d’origine kabyle, alors même que celle-ci avait pris soin de réserver une place quelques jours avant, au motif que le camping était prétendument complet. Le lendemain, la sur de la victime s’est présentée et s’est également vue refuser l’accès alors que des amis de “type européen” ont été acceptés quelques minutes après. Ces témoignages ont permis d’obtenir la condamnation du propriétaire.
La ségrégation raciale : une discothèque a pratiquée 3 tarifs distincts : un tarif très élevé pour dissuader “les indésirables”, un tarif normal pour les titulaires d’une “carte de membre” délivrée gratuitement, et bien sûr la gratuité pour les habitués. Une opération de Testing en présence d’un huissier de justice a révélé que ce système consistait en réalité, selon les termes mêmes du jugement qui a condamné le gérant, à refouler “sans aucune objectivité ni individualisation des gens supposés poser des problèmes en raison de leur seule appartenance ethnique”.
Les recours possibles :
Le refus de vente ou de prestation de services (refus de louer une chambre d’hôtel ou un appartement, de servir à boire ou à manger dans un restaurant, de vendre un billet d’avion, de laisser entrer une personne dans une discothèque, etc.), qu’il soit pur et simple ou déguisé, opposé par un professionnel ou un particulier à un consommateur pour un motif lié à son apparence, son origine, son patronyme… caractérise le délit de discrimination raciale qui peut être sanctionné par le Tribunal correctionnel.
De plus, le code de la consommation interdit à un professionnel (commerçant, artisan, producteur, industriel, restaurateur, etc.) de refuser à un consommateur la vente d’un produit ou la prestation d’un service sauf motif légitime. Celui peut résulter :
du caractère anormal de la demande du consommateur ;
d’un comportement contraire à l’ordre public (ébriété, violences…) ;
de la réglementation spécifique applicable à la vente du produit en cause (médicaments, armes, tabac, alcool…).
Le refus de vente constitue une contravention qui peut être sanctionnée par le Tribunal de police
Le “Testing” :
Ce mode de preuve qui permet d’établir l’existence d’une sélection discriminatoire a d’abord été utilisé pour dénoncer les abus commis, à l’entrée de boîtes de nuit ou de débits de boisson, à l’égard de la clientèle supposée être d’origine étrangère.
Cette méthode tend aujourd’hui à devenir un mode de preuve de la discrimination dans l’accès aux biens et aux services en général (établissement de nuit, camping, commerce, logement…) mais également en matière d’accès à l’emploi.
La Cour de cassation a reconnu que cette méthode constitue un mode preuve recevable devant les juridictions pénales (Cour de cassation chambre criminelle 12.09.2000 n° 99-87.251 et 11.06.2002 n°01-85.560). Mais recevable ne veut pas forcément dire convaincant : c’est au juge d’examiner les éléments recueillis dans le cadre d’une opération de Testing et de décider si, selon lui, elle prouve effectivement l’existence d’une discrimination.
Toute la difficulté consiste donc à préparer et à mener avec rigueur et objectivité le Testing, en étant de préférence accompagné par un huissier de justice ou des agents de police qui pourront témoigner du déroulement de l’opération et du comportement adopté par la personne accusée de discrimination raciale
Que dit la loi ? Un peu d’histoire :
La discrimination raciale porte atteinte à l’ordre public et en tant que tel c’est un délit qui peut être sanctionné par le juge pénal par une peine d’emprisonnement et/ou d’amende. De plus, le préjudice particulier qu’elle cause à la victime peut faire l’objet d’une réparation civile sous la forme de dommages et intérêts, voire même de l’annulation de la mesure discriminatoire lorsque elle concerne le domaine professionnel.Il convient donc de présenter l’objet et les règles propres au recours pénal et au recours civil, avant d’expliquer comment ces deux recours s’articulent l’un avec l’autre. Mais tout d’abord, un peu d’histoire…
De 1789 à 1965 : Les textes fondateurs :
Article 1er de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 : “Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits”. Le principe de non-discrimination est directement issu du principe d’égalité qui fut solennellement affirmé dés la révolution française comme la base fondamentale de tout régime démocratique.
Suite à la seconde guerre mondiale et à la barbarie du régime nazi, la communauté internationale a mis en place les premiers instruments normatifs et institutionnels du droit international des Droits de l’Homme. Ils condamnent toute distinction fondée sur l’origine réelle ou supposée des individus (Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948, Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales de 1950, Convention OIT C111 relative à la discrimination en matière professionnelle de 1958).
En France, le préambule de la constitution de la 4ème République (1946) stipule que “le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés”. La Constitution de la 5ème République (1958) “proclame solennellement son attachement aux Droits de l’homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946”. Ces 2 textes fondateurs ont donc aujourd’hui encore valeur constitutionnelle.
Le 21 décembre 1965, les Nations-Unies vont adopter la Convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Premier texte international à traiter spécifiquement de cette question, elle oblige les Etats signataires “à poursuivre par tous les moyens appropriés et sans retard une politique tendant à éliminer toute forme de discrimination raciale et à favoriser l’entente entre toutes les races”.
De 1965 à 1995 : Les lois françaises contre le racisme :
Ces trois décennies sont marquées par le vote des principaux textes français prohibant la discrimination raciale mais aucun dispositif institutionnel spécifique n’est alors mis en place. Ainsi, l’entrée en vigueur en France de la Convention a été suivie par l’adoption, le 1er juillet 1972, de la loi Pleven relative à la lutte contre le racisme. Elle instaure une répression aggravée pour les propos à caractère raciste et créé l’infraction pénale de discrimination raciale.
En 1978, la loi “Informatique et Libertés” qui crée la Commission nationale Informatique et Liberté (CNIL) interdit la mention dans un fichier manuel ou informatisé de certaines données nominatives considérées comme sensibles, dont “les origines raciales, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou les appartenances syndicales des personnes”.
Soucieux de mieux protéger les personnes victimes de discrimination dans le cadre de la vie professionnelle, la loi Auroux du 4 août 1982 intègre dans le Code du travail un nouvel article L122-45 qui prohibe la sanction ou le licenciement d’un salarié fondé sur “son origine, son appartenance à une ethnie, une nation ou une race”, et la loi “Le Pors” portant droits et obligations des fonctionnaires du 13 juillet 1983 rappelle expressément l’interdiction de faire des distinctions entre les fonctionnaires “en raison de leurs opinions […] ou de leur appartenance ethnique”.
En 1990, la loi Gayssot tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe prohibe les propos révisionnistes et/ou négationnistes et crée des peines complémentaires applicables au délit de discrimination raciale. De plus, elle officialise la Commission nationale consultative de Droits de l’Homme (CNCDH) et lui confie la mission de remettre le 21 mars de chaque année un rapport au Gouvernement sur “La lutte contre le racisme et la xénophobie” qui fait le bilan de la situation française et de ses évolutions.
Le 21 mars est la date retenue par l’ONU pour la “Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale”, en souvenir des 69 personnes tuées par la police au cours de manifestations pacifiques contre l’Apartheid, le 21 mars 1960 à Sharpeville (Afrique du Sud).
De 1995 à 2003 : la relance et la consolidation du dispositif ?
En octobre 1998, le Haut-Conseil à l’Intégration remet au Premier ministre un rapport intitulé “Lutte contre les discriminations : faire respecter le principe d’égalité” qui constate que le nombre de condamnations prononcées reste très faible par rapport à l’importance réelle au quotidien des comportements discriminatoires. Pour que les victimes soient réellement et efficacement protégées, il préconise que les pouvoirs publics engagent une politique volontariste et crée une autorité chargée de l’accompagnement des victimes.
En mars 1999 est publié un rapport du conseiller d’Etat J-M Bélorgey intitulé “Lutter contre les discriminations, Rapport à madame la Ministre de l’Emploi et de la Solidarité”. Il se penche spécifiquement sur les stratégies institutionnelles et normatives permettant de lutter contre les discriminations raciales, et préconise la création d’une autorité indépendante chargée du traitement individualisé des dossiers et de la formulation de propositions d’actions.
Au cours de l’année 1999, le gouvernement met en place les Commissions départementales d’accès à la citoyenneté (Codac) chargées de promouvoir localement le droit à l’intégration et la lutte contre les discriminations, et le Groupe d’étude sur les discriminations (Ged), un groupement d’intérêt public chargé d’analyser les phénomènes discriminatoires et de formuler des propositions.
Suite aux “Assises de la Citoyenneté et de la lutte contre les discriminations” qui se sont tenus le 18 mars 2000 à Paris, le Ministère de l’Emploi et de la Solidarité crée un numéro vert pour les personnes témoins ou victimes de discrimination raciale : le 114. Opérationnel depuis le 16 mai 2000, sa gestion a été confiée au Ged qui est alors renommé Groupe d’étude et de lutte contre les discriminations (Geld). Le traitement local des appels reçus au 114 est confié aux Codac.
La même année, le Conseil de l’Union européenne adopte la directive communautaire 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique. Elle définit la notion de discrimination et prévoit une nouvelle répartition de la charge de la preuve en matière civile au profit des victimes. Elle doit être transposée par les Etats membres avant juillet 2003.
La loi relative à la lutte contre les discriminations du 16 novembre 2001 procède à une réforme en profondeur du dispositif français : elle étend le domaine de la discrimination prohibée, elle instaure une nouvelle répartition de la charge de la preuve devant les Prud’hommes, elle confère aux syndicats et aux associations le droit d’agir en justice, elle augmente les pouvoirs d’enquête de l’inspection du travail, elle renforce la protection des fonctionnaires, etc. Elle est complétée en 2002 par la loi de modernisation sociale qui répartit la charge de la preuve civile de la discrimination en matière d’accès au logement et prohibe, dans le Code pénal et le Code du travail, le harcèlement moral.
La sanction pénale de l’auteur :
La discrimination raciale est sanctionné par le Code pénal dans l’ensemble des domaines de la vie quotidienne (emploi, logement, loisirs, santé, éducation, services publics, etc.). La juridiction compétente est le Tribunal correctionnel. La victime et/ou une association de lutte contre le racisme doit déposer sa plainte dans les 3 années qui suivent les faits. La victime doit établir par tout moyen (témoignages, courriers, notes de service, constat d’huissier, etc.) la preuve de la discrimination raciale qu’elle a subie. La personne poursuivie est présumée innocente tant qu’elle n’a pas été reconnue coupable et définitivement condamnée.
Dans l’ensemble des domaines de la vie quotidienne (emploi, logement, loisirs, santé, éducation, services publics, etc.), la discrimination raciale fait encourir une peine pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende lorsque elle consiste à :
Refuser ou subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service Exemples : un propriétaire exige de son locataire “qu’il ne reçoive pas dans l’appartement la visite de maghrébins”. Les peines sont portés à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsque le refus de vente ou d’accès intervient dans un lieu accueillant du public. Exemples : le tenancier d’un débit de boissons refuse de servir un client “de couleur”, le portier d’une discothèque afro-antillaise refuse les couples “d’origine européenne”.
Entraver l’exercice normal d’une activité économique Exemple : un fournisseur pratique des tarifs différents selon l’origine supposée des commerçants avec lesquels il traite, un commerçant subit des actes d’intimidation tendant à dissuader son installation dans un quartier où il est “jugé indésirable en raison de sa couleur de peau”.
Refuser d’embaucher, sanctionner ou licencier une personne Exemple : licenciement d’une vendeuse à l’égard de laquelle aucune faute n’est établie et qui fait suite aux propos du directeur commercial faisant état de “sa race” et de la “gêne occasionnée pour la clientèle”, refus d’un cabaret d’embaucher en salle des candidats “à la peau mate”.
Subordonner une offre d’emploi ou une période de formation en entreprise à un critère de distinction racial ou discriminatoire Exemple : note interne relative à l’embauche d’aides ménagères recommandant “d’éviter le personnel de couleur”, offre d’emploi stipulant dans le profil de poste qu’il faut être “d’origine européenne”.
Refuser ou subordonner l’accès à un stage à un critère de distinction racial ou discriminatoire Exemple : refus systématique de prendre en considération les demandes de stage en entreprise émanant de personnes dont le nom serait “à consonances maghrébines”.
La discrimination raciale commise par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, fait encourir une peine de 5 ans d’emprisonnement et 75 .000 euros lorsqu’elle consiste à :
Refuser le bénéfice d’un droit accordé par la loi Exemple : refus d’un agent de traiter un dossier d’aide au logement uniquement motivé par le patronyme “à consonance étrangère” du demandeur, délibération d’un conseil municipal suspendant la fourniture de matériel à une école maternelle du fait de “l’état de l’immigration dans cette cité”.
Entraver l’exercice normal d’une activité économique Exemple : refuse de délivrer une autorisation d’exploitation d’un fonds de commerce à une personne en raison de son “origine étrangère”, exercice abusif du droit de préemption par la commune pour empêcher le rachat d’un local commercial en vue de l’installation d’une boucherie “Casher”.
La juridiction compétente est le Tribunal correctionnel. La victime et/ou une association de lutte contre le racisme doit déposer sa plainte dans les 3 années qui suivent les faits. Pour exercer les droits de la partie civile, l’association doit être déclarée depuis 5 ans au moins à la date des faits ; ses statuts doivent viser la lutte contre le racisme et les discriminations raciales ; si les faits concernent une victime identifiée elle doit au préalable obtenir son accord.
La victime doit établir par tout moyen (témoignages, courriers, notes de service, constat d’huissier, etc.) la preuve de la discrimination raciale qu’elle a subie. La personne poursuivie est présumée innocente tant qu’elle n’a pas été reconnue coupable et définitivement condamnée
La réparation du préjudice de la victime :
Au regard des règles traditionnelles de la responsabilité civile, le fait de pratiquer une discrimination raciale est une faute. Le préjudice économique ou moral qu’elle cause à la victime peut donc être réparé par la condamnation de l’auteur au versement de dommages et intérêts.
Dans le domaine de l’emploi (stage, formation en entreprise, embauche, vie professionnelle, rémunération, sanction, licenciement…), la juridiction compétente est le Conseil des prud’hommes dans le ressort duquel se trouve l’entreprise concernée. Afin de mieux protéger le salarié, il peut non seulement accorder des dommages et intérêts mais également annuler la mesure litigieuse, mettre fin au contrat de travail à la demande du salarié, re-qualifier la rupture du contrat de travail en un licenciement aux torts exclusifs de l’employeur, ou condamner l’employeur au versement des impayés de salaire. Le juge prud’homal doit être saisi par la victime, un syndicat ou une association de lutte contre le racisme dans les 5 années qui suivent les faits lorsque l’action vise à obtenir le paiement des salaires, 30 années dans les autres cas.
Dans les autres domaines, la juridiction compétente est le tribunal d’instance lorsque le litige porte sur une somme inférieure à 7.600 euros, au-delà il faut saisir le tribunal de grande instance. La victime doit en principe le saisir dans les 10 années qui suivent les faits. Elle doit prouver par tout moyen l’existence du comportement discriminatoire, en quoi elle a subi un préjudice et le lien de causalité existant entre les deux.
A savoir :
Dans un litige civil en matière de discrimination dans le domaine de l’emploi ou du logement (location immobilière à usage d’habitation principale dans le secteur privé ou public), la loi prévoit un aménagement de la charge de la preuve au bénéfice de la victime. Celle-ci doit présenter des éléments de fait précis et concordants qui laissent présumer qu’elle a subi une discrimination et, au vu de ces éléments, il incombe alors au bailleur ou à l’employeur de démontrer que sa décision est étrangère à toute discrimination et est raisonnablement justifiée, le cas échéant, par la gestion normale de son patrimoine immobilier ou de son entreprise.
Articulation du recours civil et pénal :
Ces deux recours ont pour origine une même faute (le comportement discriminatoire) c’est pourquoi ils sont fréquemment déclenchés simultanément. En pratique deux situations distinctes sont envisageables :
Des poursuites pénales sont engagées avant le recours civil :
la victime peut alors exercer l’action civile directement devant le juge pénal (en se constituant partie civile auprès du tribunal correctionnel) ou devant le juge civil en saisissant le Conseil des prud’hommes (si le litige concerne la vie professionnelle) ou le Tribunal administratif (si le litige est entre un usager et l’administration) ou le Tribunal de grande instance (pour tous les autres domaines).
MAIS Non seulement le recours civil ne sera examiné qu’une fois que le juge pénal aura rendu son jugement, mais surtout cette décision sur les intérêts civils ne pourra pas contredire ce qui a été décidé par le juge pénal. La faute pénale conditionne donc la reconnaissance de la faute civile.
Concrètement, en cas de condamnation pénale de la personne poursuivie, la victime sera forcément indemnisée du préjudice qu’elle a subi mais, inversement, en cas de relaxe de la personne poursuivie (que ce soit au bénéfice du doute ou pas), la condamnation civile pour discrimination de celle-ci est impossible.
Aucunes poursuites n’ont été engagées :
la victime peut saisir le juge civil en vue d’obtenir la réparation du préjudice subi du fait du comportement discriminatoire de l’auteur ou porter plainte et déclencher l’action pénale auquel cas les règles précédemment exposées s’appliqueront.
Quels sont les dispositifs de lutte et/ou de prévention ? Une politique publique récente :
Reconnues depuis peu en France, la réalité et l’ampleur de la discrimination raciale font désormais l’objet d’une mobilisation des pouvoirs publics et des associations antiracistes. L’émergence récente du discours de lutte contre les discriminations raciales en tant que priorité politique est en partie due aux transformations internes de la société française mais également à la mise d’une véritable politique européenne sur ce sujet.
En France, la nouvelle politique publique de lutte contre les discriminations est mise en uvre conjointement par des structures publiques et associatives qui, parallèlement aux aspects juridictionnels, participent à la mise en place de chartes et programmes locaux, à l’élaboration de guides pratiques ou à l’organisation de manifestations pédagogiques dont la plus emblématique est la “Semaine nationale de lutte contre le racisme”.
Une politique publique récente :
La politique de lutte contre les discriminations raciales en France :
Depuis la fin du XIXème siècle, la France est une terre d’immigration. C’est à partir de cette période que débute l’immigration massive. En fonction des périodes, la France a eu recours à des travailleurs de nationalité différente. Ces différentes vagues migratoires ont contribué à diversifier la physionomie de l’immigration. Pour accompagner cette immigration, différentes politiques d’intégration ont été mises en uvre.
Dans un contexte économique et social difficile, nourri par une incertitude sur l’avenir, l’étranger ou “celui qui en a l’air” est devenu pour certains citoyens le bouc-émissaire idéal, responsable de tous leurs maux. A la fin des années 90, les sentiments et les comportements racistes et xénophobes constituent alors une préoccupation importante en France. Le racisme se banalise insidieusement.
Les rapports de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme en 1997 (“La lutte contre le racisme et la xénophobie”) et du Haut Conseil à l’Intégration en 1998 (“Lutte contre les discriminations : faire respecter le principe d’égalité”) ont mis en évidence le développement des pratiques de discriminations raciales et la nécessité de mieux les identifier pour les combattre efficacement.
En 1998, au niveau gouvernemental, les discriminations sont désormais identifiées, reconnues comme un danger majeur pour la cohésion nationale. Le rapport sur la politique d’intégration des pouvoirs publics, présenté par Martine Aubry le 21 octobre 1998, inscrit la lutte contre les discriminations dans les axes forts du gouvernement.
La priorité politique de lutte contre les discriminations est par ailleurs réaffirmée lors de la table ronde sur les discriminations raciales dans le monde du travail, réunissant l’État et les partenaires sociaux en mai 1999 et la déclaration de Grenelle.
L’existence d’une forme de “racisme institutionnel” y est enfin reconnue, et les difficultés d’intégration ne sont plus imputées aux seuls immigrés. La société dans son ensemble porte une responsabilité partagée dans le développement des pratiques discriminatoires qui affectent les parcours d’intégration.
Pour mettre en oeuvre cette politique de lutte contre les discriminations raciales, la France s’est dotée d’un dispositif institutionnel spécifique (le Geld, le 114 et les Codac) et à adopter la loi relative à la lutte contre les discriminations du 16 novembre 2001 et la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 qui complètent et renforcent les dispositions du Code du travail, du Code pénal et de la loi relative aux droits et aux obligations des fonctionnaires.
En 2002, la lutte contre les discriminations raciales fut consacrée “Grande cause nationale”.
Le rôle moteur de l’Union européenne :
1997 fut proclamé “Année européenne de lutte contre les discriminations” et le traité d’Amsterdam a alors introduit dans le Traité de Rome un nouvel article 13 en vertu duquel le Conseil de l’Union européenne est désormais compétent pour prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre toutes les formes de discrimination. Cet article est donc la base de la compétence communautaire sur cette question et il va permettre l’adoption de ce qui sera ensuite familièrement appelé le “Paquet anti-discrimination” :
Directive 97/80/CE du 15 décembre 1997 relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination fondée sur le sexe ;
Directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en uvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique ;
Directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ;
Programme d’action communautaire du 27 novembre 2000 de lutte contre les discriminations pour la période 2001-2006, destiné à soutenir et compléter la mise en oeuvre des directives ;
Le programme d’initiative communautaire Equal : Financée par le Fonds social européen (FSE), l’initiative Equal a été lancée pour la période 2000-2006 pour mettre en uvre de nouveaux moyens de lutte contre les discriminations et inégalités dans l’accès à l’emploi et dans la vie professionnelle.
Les actions qu’il finance doivent s’inscrire dans une logique de coopération transnationale visant à mettre en place des expériences innovantes en matière de lutte contre les discriminations dans l’emploi. Ce programme fonctionne donc comme un “laboratoire d’expériences” qui doit permettre d’identifier de nouvelles pistes d’action en faveur de la stratégie européenne pour l’emploi.
Le réseau Raxen :
Sur l’initiative de Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes (EUMC), le réseau européen d’information sur le racisme et la xénophobie (Rxen) a été mis en place en 2000 afin d’identifier, dans chaque pays d’Europe, les organismes qui agissent dans ce domaine, les évolutions du droit, les initiatives et les publications récentes (études, rapports, ouvrages pédagogiques…), etc.
En France, l’Agence pour le développement des relations interculturelles (Adri) est le point d’appui national du réseau Raxen. Elle a constitué un consortium d’organismes comprenant le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), le Groupe d’études et de lutte contre les discriminations (Geld), D’un monde à l’autre et le Centre interdisciplinaire de recherche (Cir).
Les acteurs de la lutte contre les discriminations. Adresses utiles :
Le 114 : Ce service téléphonique gratuit est accessible en France métropolitaine et dans les Départements d’outre-mer du lundi au vendredi de 9H00 à 19H00 (heures métropolitaines). Il répond aux demandes d’informations et de conseil de toute personne victime ou témoin de discriminations.
Les Commissions Départementales d’Accès à la Citoyenneté (CODAC) : Les CODAC ont été mises en place dans chaque préfecture en janvier 1999. Elles sont co-présidés par le Préfet et le Procureur de la république et réunissent des élus locaux, des représentants des principaux acteurs administratifs, judiciaires, associatifs et syndicaux.
Elles ont une double mission :
Information et soutien des personnes victimes de discrimination raciale ;
Conception, mise en place et suivi du programme d’action départemental de lutte contre les discriminations.
Le programme d’action est élaboré à partir d’un diagnostic des difficultés locales et offre notamment un cadre pour promouvoir et valoriser toutes les initiatives en faveur de l’accès au droit, du plein exercice de la citoyenneté, de l’intégration, de la lutte contre le racisme et ses manifestations.
Associations et Syndicats : Les associations engagées dans la lutte contre le racisme et les discriminations raciales mènent ce combat à la fois en organisant des actions de sensibilisation et d’information et en assistant les victimes sur le terrain judiciaire.
En effet, les associations régulièrement déclarées depuis au moins 5 ans à la date des faits et qui ont pour objet statutaire de lutter contre le racisme et/ou les discriminations raciales peuvent saisir la justice en cas de discrimination, de violences ou de propos racistes. Des associations comme SOS Racisme, le MRAP, la Ligue des Droits de l’Homme ou la LICRA contribuent ainsi à faire reculer l’intolérance.
Les principales organisations syndicales se sont également engagées dans la lutte contre les discriminations dans le domaine de l’emploi. Elles sont un intermédiaire particulièrement utile pour les salariés confrontés à ces comportements et peuvent, avec l’accord de la victime, saisir le Conseil des Prud’hommes en vue de les faire cesser.
Agence pour le Développement des Relations Interculturelles (ADRI) : Le groupement d’intérêt public ADRI est un centre de ressource national qui recueille et diffuse des informations sur l’intégration des populations d’origine étrangère et la lutte contre les discriminations raciales en France.
Elle conçoit et développe des outils techniques au service des acteurs de la politique de la ville et de l’intégration, des agents des services publics, des responsables et bénévoles des associations, des travailleurs sociaux, des entreprises et des élus locaux. L’ADRI se charge également d’animer et de mettre en réseau les acteurs de la politique de la ville et de l’intégration.
ADRI
4 rue René Villermé – 75011 Paris
Tel : 01 40 09 69 19 – Fax : 01 43 48 25 17
Site : www.adri.fr
Groupe d’étude et de lutte contre les discriminations (GELD) : Créé en 1999, le groupement d’intérêt public GELD associe l’Etat, les organisations syndicales et associations. Il remplit la double mission d’observatoire national des phénomènes discriminatoires liés à l’origine réelle ou supposée et de gestion du numéro vert 114.
GELD
9-11 rue Georges Pitard – 75015 PARIS
Tel : 01 55 76 39 40 – Fax : 01 55 76 39 59
Site : www.le114.com
Fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations (FASILD) : Etablissement public national à caractère administratif créé en 1958, le FASILD finance et met en oeuvre des actions visant à l’intégration des populations immigrées ou issues de l’immigration résidant en France ainsi qu’à la lutte contre les discriminations raciales.
Il dispose d’un budget d’intervention d’environ 150.000.000 euros et finance les actions menées par environ 7.000 organismes (associations, entreprises publiques, collectivités territoriales, entreprises, etc.).
Son action est coordonnée au niveau local par une vingtaine de délégations régionales qui déterminent les programmes régionaux et décident de l’attribution des subventions.
FASILD
209/211 rue de Bercy – 75585 PARIS CEDEX 12
Tel : 01 40 02 77 01 – Fax : 01 43 46 04 27
Direction de la population et des migrations (DPM) : Ce service du ministère du Travail et de la Solidarité a notamment pour mission de définir et de coordonner la politique publique menée en faveur de la lutte contre les discriminations, en liaison avec les autres ministères et les autres acteurs nationaux.
DPM
10-16 rue Brancion – 75015 Paris
Tel : 01 40 56 60 00 – Fax : 01 40 56 50 42
Les chartes et programmes locaux de lutte contre les discriminations raciales :
La prévention des discriminations raciales se traduit au travers d’actions collectives, impulsées par les pouvoirs publics nationaux ou les acteurs locaux : Codac, associations locales de lutte contre racisme, élus locaux, syndicats, acteurs économiques, intermédiaires de l’emploi, acteurs du logement , de l’éducation, des loisirs et du sport…
Les plans locaux de lutte contre les discriminations :
Les plans locaux de lutte contre les discriminations ont été lancés par la circulaire interministérielle du 30/10/2001 relative à la relance du dispositif 114 / CODAC. Mis en uvre par les Codac, ils s’appuient sur un diagnostic local de la situation en matière de discrimination raciale.
Les actions du plan local couvrent des domaines thématiques variés : l’emploi, la formation, le logement, les loisirs, l’éducation et la citoyenneté…
Elles s’articulent par ailleurs autour des thèmes suivants :
l’amélioration du traitement des signalements du 114 ;
la connaissance locale des situations de discrimination raciale (avec la mise en place d’études et de diagnostic…) ;
la communication sur le dispositif 114 / Codac ;
l’accès au droit commun en direction des populations potentiellement victimes de discriminations (information sur les droits et les recours juridiques, accompagnement des publics, informations sur les dispositifs de droit commun…) ;
la sensibilisation à la thématique des discriminations raciales des opérateurs et institutions locales (sensibilisation et formation des acteurs, mobilisation des acteurs autour de chartes…).
La lutte contre les discriminations dans les contrats de ville :
Le contrat de ville est un contrat passé entre l’Etat et les collectivités territoriales qui engage chacun des partenaires à mettre en uvre des actions concrètes et concertées pour améliorer la vie quotidienne des habitants dans les quartiers connaissant des difficultés (chômage, violence, logement,…) et prévenir les risques d’exclusion sociale et urbaine. Les contrats de ville de la nouvelle génération concernent plus de 1300 quartiers et 6 millions d’habitants devraient bénéficier des actions menées.
Pour la période 2000-2006, la lutte contre les discriminations raciales est un objectif prioritaire affichée par la plupart des contrats de ville. Les actions prévues sont majoritairement orientées vers l’information, l’accès aux droits et l’accompagnement des publics concernés et concernent essentiellement le domaine de l’emploi et du logement.
Lexique de l’intolérance :
Antisémitisme / antijudaïsme : idéologie ou comportement d’hostilité systématique à l’égard des juifs. Les préjugés qui l’inspirent sont d’ordre religieux (le peuple juif est accusé de “déicide”) et économiques (le cliché associant les juifs à des “usuriers”). Plus récemment, ces préjugés ont été associés aux théories racistes reprises par le régime nazi qui a assassiné 6 millions de juifs.
Apartheid : état de séparation, régime de ségrégation systématique mis en place en Afrique du Sud de 1948 à 1994 et fondé sur “le développement parallèle et séparé des races”, autrement dit l’asservissement de la “population noire” majoritaire et l’exploitation des richesses locales au seul profit de la “minorité blanche”.
Discrimination : différence de traitement opérée aux dépens d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de son origine réelle ou supposée, son sexe, son orientation sexuelle, son age, son apparence physique, son patronyme, son handicap, son age, sa religion, ses opinions politiques ou syndicales, etc. voir aussi “La discrimination : qu’est ce que c’est ?”
Ethnie : peuple, groupe d’individus partageant une culture et une langue commune. Le terme tend progressivement à intégrer le sentiment d’appartenance à un même groupe, la conviction de partager une même origine. Il devient alors un synonyme “politiquement correct” de celui de “race”.
Ethnocentrisme : tendance à valoriser la culture et le mode de vie de son groupe et à l’étendre abusivement à la compréhension des autres sociétés, intolérance à l’égard des normes culturelles autres que celles du groupe d’appartenance du sujet. Ce rejet de l’altérité implique une déshumanisation de l’autre, considéré et traité comme un “animal”, qui constitue le socle du racisme. Les justifications données à l’esclavage, à l’extermination des indiens ou des juifs sont les manifestations les plus extrêmes de l’ethnocentrisme.
Fascisme : nom donné au mouvement d’extrême droite autoritaire et violent fondé en Italie en 1919 par Benito Mussolini et régime politique établi par ce mouvement de 1922 à 1945. par extension, le terme désigne tout mouvement politique fondé sur la dictature d’un parti unique, le culte du chef, la promesse d’un “ordre nouveau”, l’exaltation nationaliste et militariste, la volonté de “former” la jeunesse, le corporatisme, etc.
Islamophobie : idéologie ou comportement d’hostilité systématique à l’égard des musulmans.
Nationalisme : sentiment d’appartenance à une nation. Le terme a progressivement pris une signification péjorative : d’abord proche du concept de “patriotisme”, il a été accaparé par l’extrême droite contemporaine qui pense le national selon des modèles ethniques et/ou culturels. Cet ethnonationalisme utilise alors le droit à la différence culturelle ou à l’identité ethnique pour légitimer son discours xénophobe et raciste dans l’espace public
Négationnisme : Idéologie de prétendus historiens niant la réalité et/ou l’ampleur d’un génocide (Juifs, Tziganes, Kurdes, Arméniens, Rwanda, Cambodge, Bosnie, etc.). Le terme est apparu en France dans les années 1970 lorsque des extrémistes ont prétendu remettre en cause la Shoah et l’existence des chambres à gaz, en auto-qualifiant leur discours de “révisionnisme”, et ce afin de suggérer que leur démarche serait d’ordre historico-scientifique, alors qu’il s’agit en réalité d’une forme particulièrement perverse d’antisémitisme.
Préjugé : Opinion basée sur la généralisation hâtive d’une expérience personnelle ou imposée par le milieu socioculturel. Il est fondé sur le “principe d’économie” en vertu duquel tout individu est porté à penser par stéréotypes plutôt qu’à réfléchir aux différents aspects de la réalité. Toutes les idéologies prospèrent en exploitant cette tendance instinctive et rassurante à la globalisation du monde aux dépens de l’expérience et de la réflexion objective.
Race : subdivision d’une espèce animale (ex : les races canines). Le terme a été appliqué aux êtres humains par des théories scientifiques reposant soit sur l’idée que l’humanité serait divisée en groupes de différentes couleurs qui n’auraient connu les métissages que de façon accidentelle et relativement récente, ce qui s’avère historiquement faux, soit sur l’idée d’un patrimoine génétique commun à chaque groupe humain, ce que la science a aujourd’hui clairement démenti. Privé de caution scientifique, le terme prospère malgré tout dans les discours idéologiques qui refusent obstinément l’argument scientifique, et demeure un mythe social censé désigner les descendants d’une même lignée unis par le sang de l’ancêtre commun.
Racisme : idéologie fondée sur l’idée qu’il existe plusieurs races humaines et qui affirme la supériorité d’un groupe racial sur les autres, comportements et attitudes d’hostilité systématique à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes fondés sur cette idéologie. Fondamentalement inspiré par la hantise du métissage et la volonté de préserver une soi-disant “pureté” de la lignée, le terme tend à se banaliser pour désigner toute attitude de rejet liée à l’origine, la religion, la culture, l’apparence physique, le patronyme, voire même à l’âge, au sexe, etc. La force de cette idéologie réside dans sa capacité à absorber tous les motifs invoqués pour justifier la peur d’autrui et le désir de l’agresser, à se diluer dans un flou terminologique qui lui a permis de se banaliser au point d’être souvent présenté comme un “mal ordinaire” et inévitable.
Xénophobie : hostilité systématique à l’égard des étrangers et de tout ce qui est perçu comme étranger, conçu comme étant nécessairement un ennemi. Cette attitude de haine, de rejet, de peur de l’autre dans sa différence n’implique certes pas l’idée d’infériorité propre à l’idéologie raciste, mais ces concepts sont en pratique souvent associées dans le discours de l’extrême droite